Les drones, nouveaux couteaux suisses de la police aux frontières
La Presse de la Manche, 11 janvier 2025 (extrait)
Depuis un an, au port de Cherbourg-en-Cotentin, des drones assurent la surveillance de la zone d’accès restreint. Un équipement high-tech désormais utilisé pour d’autres missions.
Depuis un peu plus d’un an, le préfet de la Manche a autorisé la mise en service de drones dédiés à la surveillance de la zone frontalière du port de Cherbourg-en-Cotentin, de la zone d’accès restreint (ZAR) et de ses abords immédiats. Là où les migrants ont l’habitude d’évoluer. Les drones évoluent en fonction de la météorologie et offrent des images de qualité avec une localisation précise.
« Ils peuvent voler à une altitude maximum de 120 mètres, dans le plus grand silence. Cela permet d’accéder à des endroits jusqu’à présent inaccessibles par voiture, comme le secteur des enrochements à proximité de la zone des Mielles qui sont des caches courantes pour les migrants« , explique le brigadier-chef Anthony, télépilote à Cherbourg. Les caméras thermiques qui équipent leurs drones les aident aussi à découvrir, notamment la nuit, où sont cachés les migrants.
Polyvalence
En 2024, la brigade des moyens aériens de Cherbourg créée en mai a apporté son soutien dans le cadre de missions judiciaires, comme la surveillance de trafics de stupéfiants (notamment sur le trait de côte après la découverte de nouveaux ballots de produits stupéfiants sur les plages) ou la sécurisation de sites sensibles, sur réquisition des procureurs de la République.
« En juin, nous avons prêté notre concours lors d’une opération de police sur un campement de la communauté des gens du voyage à Saint-Lô qui avait eu lieu après des tirs ayant touché des pavillons voisins, commente le brigadier-chef Anthony. Nous avons également été sollicités pour surveiller les abords de la mosquée de Cherbourg ou certains secteurs des Provinces après les violences urbaines qui ont suivi la disparition du jeune Sulivan il y a quelques mois. C’est un point fort. Le drone offre cette vision aérienne qui permet de détecter très rapidement un trouble à l’ordre public. Avec le renvoi des images en temps réel vers le poste de commandement, cela permet d’établir une stratégie d’intervention, d’appuyer les effectifs au sol et de les guider pour faire cesser le trouble. C’était vraiment pour nous une satisfaction » annonce le Brigadier-Chef Anthony.
Ils seront le samedi 11 janvier 2025 à Granville pour surveiller les abords du stade lors du match de gala du club local face à Bordeaux. Ils ont aussi encadré en août la parade du festival interceltique de Lorient, assuré en novembre la surveillance aux abords du Palais des sports de Caen-la Mer qui a fait l’objet, en novembre, de mesures de sécurité renforcées à l’occasion du match de basket féminin France-Israël. Ils étaient aussi présents à Angers sur une visite officielle de l’ex-Premier ministre Michel Barnier ou encore sur des missions sensibles de convois nucléaires.
Mais parmi les temps forts figure leur participation durant trois semaines au dispositif de lutte anti-drone sur le parcours de la Flamme olympique, entre Châteauroux et Cherbourg. Leur travail consistait à neutraliser tous les risques engendrés par les drones. Lors du 80e anniversaire du Débarquement dans la Manche, les deux fonctionnaires étaient enfin mobilisés lors des cérémonies à Saint-Lô et Cherbourg en présence du chef de l’État.
À Strasbourg, la préfecture banalise la vidéosurveillance par drone
Rue89, 21 janvier 2023 (extrait)
C’est une évolution classique pour les dispositifs sécuritaires. À Strasbourg, au tout début, les drones ont été utilisés dans les quartiers populaire. Ensuite, ils ont discrètement surveillé des manifestations. Puis ils sont apparus sur des évènements comme le Marché de Noël. Mais désormais, la vie courante semble suffire. Pendant dix jours du mois de janvier, la police nationale est autorisée à surveiller avec trois drones une zone très étendue de la ville.
Dans un premier temps , le 20 décembre 2024, la préfecture du Bas-Rhin a publié un arrêté autorisant « la captation, l’enregistrement et la transmission d’images » sur des drones les 3, 4, 10, 11, 17, 18 janvier trois week-ends), ainsi que pendant la session parlementaire européenne, du 22 au 25 janvier. Et ce, sur les rues aux alentours du centre israélite du Bas-Rhin, de la gare et des institutions européennes. Dans un second temps , le préfet a publié un nouvel arrêté le 17 janvier ajoutant l’ensemble de la Grande Île strasbourgeoise à la zone potentiellement surveillée du 22 au 25 janvier.
Pour se justifier, la préfecture du Bas-Rhin rappelle ainsi les différents attentats survenus en France depuis 2012, ceux déjoués depuis 2020, l’attentat sur le marché de Noël de 2018, les menaces d’Al Qaïda à l’encontre de l’Occident, ou encore l’arrestation d’un néo-nazi en Alsace en 2024. Certes, mais pourquoi la police a t-elle besoin de drones à ces dates précises à Strasbourg ? La préfecture ne justifie pas réellement ce point dans ses arrêtés.
Depuis que la loi l’autorise , le ciel de Strasbourg est parfois le terrain de vol de ces drones de surveillance. En 2024 , l’État a autorisé l’utilisation de drones dans plus de dix arrêtés distincts – pour une manifestation d’agriculteurs en février et novembre, contre les rodéos urbains à Hautepierre, à la Meinau, au Neuhof et à l’Elsau en avril, à l’occasion du match de football Strasbourg – Metz en mai, pour lutter contre les cambriolages en décembre ou encore pendant toute la durée du marché de Noël
En 2023, trois avocats avaient contesté la légitimité de l’utilisation des drones pour surveiller le marché de Noël . Si le Conseil d’État a décidé en référé qu’il n’y avait pas lieu de suspendre l’autorisation donnée par le préfet, le tribunal administratif n’a pas encore jugé le fond du dossier. Les avocats estiment notamment que l’atteinte à la vie privée que représente cette surveillance est disproportionnée par rapport aux bénéfices de l’utilisation des drones.
Quant à l’autorisation du mois de janvier 2025, c’est la première fois à Strasbourg qu’une session parlementaire européenne suscite à elle seule le déploiement de cet outil de surveillance. Aussi, les vendredis et samedis désignés par l’arrêté préfectoral ne correspondent pas à des manifestations annoncées.
Contactée pour savoir à quoi correspondent les jours de janvier où est autorisée la surveillance par drone, la préfecture du Bas-Rhin n’a pas répondu à l’heure de publier cet article.