Archives de catégorie : Commentaires déplacés

San Francisco (Etats-Unis) : à l’assaut des robots-taxi !

Los Angeles (Etats-Unis), 10 février 2024 : le robot-taxi autonome de Waymo (Google) pris d’assaut puis incendié lors du Nouvel An lunaire

Que leurs concepteurs les nomment « robot-taxi », « voiture auto-pilotée » ou « taxi autonome sans conducteur », ce qui est certain est qu’ils sont en train de se multiplier dans les rues de Californie depuis quelques temps. Initialement autorisés dans cet État nord-américain en février 2022 avec toutefois un « chauffeur de sécurité » à bord pour reprendre le contrôle en cas de gros pépin, ces véhicules électriques sans conducteur ont finalement reçu l’autorisation de circuler tous seuls en août 2023. Deux opérateurs ont alors envahi les rues de San Francisco avec 600 robots-taxis, Cruise (filiale de General Motors) et Waymo (filiale de Google, plus précisément de sa maison-mère Alphabet), en les faisant tourner de jour comme de nuit pour réaliser des trajets à réserver et payer sur smartphone.

Afin de rassurer les braves citoyens tout en assurant les profits de la techno-industrie, le régulateur californien publie régulièrement des rapports d’incidents en contrepartie de ses autorisations de circuler, indiquant par exemple qu’au cours des cinq premiers mois de 2023, il en avait enregistré plus de 240 à San Francisco, au cours desquels un véhicule de Cruise ou de Waymo « aurait pu créer un risque pour la sécurité » (des piétons, cyclistes et autres véhicules). Mais comme il ne faut pas exagérer, ces deux entreprises peuvent en même temps conserver au chaud les chiffres à propos des accidents réellement causés par leurs voitures sans conducteur, cette fois au nom du sacro-saint « secret commercial ».

Sauf que voilà, le réel, plus sensible que les plans d’ingénieurs et les rapports de bureaucrates, plus réceptif que des capteurs motorisés dirigés par Intelligence Artificielle, a fini par rattraper les pontes du progrès à tout prix.
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Meuse : la tradition du relai de la flamme enfin reconnue

[Article repris du site Manif-Est, 7 décembre 2023. Note : nous avons ôté le lien cliquable vers le site du Ministère des sports]

On a dit beaucoup de mal des Jeux Olympiques – à juste titre – et ce depuis longtemps. C’était déjà de la merde à Londres et à Rio, à Albertville ou à Pékin, c’était déjà le lieu de l’exaltation des nationalismes à Berlin en 1936 et il y a fort à parier qu’on aurait même trouvé ça nul dans la Grèce antique. Pourtant, force est de constater que le Comité olympique n’est pas toujours dépourvu de bon sens et qu’il sait reconnaître, apprécier et valoriser les coutumes locales. Il en va ainsi de la venue prochaine de la Flamme olympique dans le sud du département de la Meuse.

Le 29 juin 2024, le « Relai de la flamme » traversera en effet nos verdoyantes campagnes. On pourrait légitimement se demander pourquoi. C’est vrai qu’un événement de moins d’une journée dont le coût (à la charge du département) excède le budget annuel du Conseil général pour le sport, ça peut sembler surprenant. Et puis quand on pense à la Meuse, on ne pense pas directement à l’athlétisme ou au lancer de javelot, encore moins au tennis ou au breakdance (oui, c’est un sport olympique désormais). Certes, la pédale de bicyclette a été inventée à Bar-le-Duc mais ça ne peut pas suffire pour labelliser tout ça « Terre de Jeux ».

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Les bouffons constitutionnels et les mouchards électroniques

Il y a quelques jours, entre l’adoption définitive de la loi dite « Plein emploi » (avec ses 15 heures d’activité hebdomadaire obligatoire pour les bénéficiaires du RSA) et celle en cours d’examen contre les immigrés et les demandeurs d’asile *, les progressistes en toge et en cravate ont fini par trouver un petit motif de satisfaction. Ouf, enfin une victoire des libertés formelles sur la raison d’Etat, enfin de quoi continuer à défendre coûte que coûte les institutions de la domination, qui après tout comportent aussi quelques garde-fous bien méritoires contre l’injustice.

C’est en effet jeudi 16 novembre que le Conseil constitutionnel a rendu sa décision à propos de la fameuse « loi Justice » du 11 octobre dernier, en décidant notamment d’invalider l’article 6 qui permettait l’activation à distance judiciaire de tout appareil électronique à l’insu de son possesseur, afin de procéder à des sonorisations et des captations d’images par les flics. Ce qui nous donne d’un côté un président du Conseil national des barreaux de France se disant «particulièrement satisfait », et d’un autre la déception du syndicat policier Alliance, qui attendait impatiemment de pouvoir mettre en œuvre « cette disposition de bon sens et primordiale pour lutter contre la moyenne délinquance comme contre le haut du spectre de la criminalité». Voilà pour le spectacle démocrate.
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Le chiffre du jour : « une dizaine par mois »

Une des manières du Pouvoir de gérer certains pans de la conflictualité sociale, et en particulier les attaques contre lesdites « infrastructures critiques », est en général de les passer sous silence afin de ne pas donner de mauvais exemples, mais aussi d’en minimiser la portée lorsqu’elles ne peuvent être tues, ou encore tout simplement de les recouvrir du voile pudique de la « panne » et de l’« accident » quand certaines conséquences se font trop visibles.

En ce qui concerne les destructions volontaires d’antennes de téléphonie mobile dans l’Hexagone, on a ainsi vu dans un premier temps une invisibilisation de ces vagues d’attaques, puis, lorsqu’il n’était plus possible de taire ces nombreux sabotages, se développer un discours alarmiste sur leurs conséquences qui ne toucheraient pas la domination mais avant tout la population « la plus fragile », avant que l’arrivée programmée de la 5G ne soit utilisée pour tenter de décrédibiliser l’ensemble des saboteureuses en les faisant passer pour « des illuminés » et des « complotistes »…  alors même que la plupart des antennes prises pour cibles n’étaient pas encore équipées de cette dernière technologie. Enfin, après cette ultime phase en forme de gigantesque contre-feu, la plus grande partie de ces attaques est à nouveau retournée sous la chape de silence des habituels porte-parole de préfecture.

Le 12 octobre dernier, quelle n’a donc pas été notre surprise lorsque la très officielle Fédération française des Télécoms (FFT), lobby regroupant SFR, Bouygues Telecom, Orange et autres sociétés (mais pas Free), a choisi de publier une discrète actualisation sur les récents sabotages d’antennes-relais.
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Le petit café du matin

Suite à l’exécution policière de Nahel le 27 juin dernier, tandis que dans un pantomime bien rodé les uns ont réclamé « justice » ou « amnistie » à l’État, d’autres ne se sont pas privés d’agir à la fois contre la justice et contre ses serviteurs. Nuit après nuit, directement, loin des projecteurs et de tout dialogue avec la main gauche du pouvoir assassin. Cette dimension restée jusque-là un peu dans l’ombre des émeutes vengeresses, vient cependant de connaître un premier bilan officiel.

Après avoir visité la veille le tribunal d’Aurillac saccagé par qui a su saisir l’occasion (250 000 euros de dégâts), le ministre de la Justice était en effet ce matin au micro de RTL pour vanter son action contre le « processus de décivilisation » de la société, selon le mot d’ordre lancé par le Président Macron en mai et réitéré il y a quelques jours dans un grand hebdomadaire. C’est ainsi qu’on en a appris un peu plus sur les salutaires travaux de démolition qui ont égayé les nuits de la fin juin, et plus précisément sur ceux qui ont concerné un pilier honni de cette civilisation, à savoir les bâtiments de Justice.

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Une usine de moins en moins ordinaire…

Une visite peut en cacher une autre

Le 30 mars dernier, les élèves de 4ème du collège Les Deux Vallées à Cheylard, dans le Vivarais, ont effectué une visite d’entreprise a priori banale. Si les plus assidus ont du se retenir de bâiller face à la présentation des différents métiers de l’aéronautique, les plus sensibles se sont peut-être dits qu’après tout, une journée de classe loin des quatre murs qui enferment les rêves, c’était déjà ça de pris. Le même jour, un second groupe faisait également le tour de cette usine, mais de façon beaucoup plus intéressée, puisqu’il était entièrement composé d’entrepreneurs et d’élus.

Ces deux visites se sont déroulées à La Voulte-sur-Rhône (Ardèche), et plus précisément au siège de l’entreprise Fregate Aero, qui construit « des sous-ensembles de structures pour les avions et hélicoptères, à base de métal, de tôle, de pièces usinées. Cela peut être des morceaux d’aile, de carlingue, d’armoire électrique… avec pour principaux clients Airbus, Dassault et Safran » selon les explications données aux petits comme aux grands par Frédéric Guimbal, son président. Ce jour-là, l’homme au sourire crispé qui distillait une sotte publicité pour sa boîte de mort, avait pourtant d’autres préoccupations en tête. De celles qui ne concernent pas un auditoire captif, mais un tout autre type de visite  : trois jours plus tôt, lundi 27 mars vers 5h du matin, un incendie volontaire venait en effet de toucher la seconde usine du groupe Fregate Aero, située dans le village de Beauchastel à moins de cinq kilomètres de là.
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Belfast (Irlande du Nord) : le Titanic et les antennes-relais

Vingt-cinq ans après la signature de l’accord dit du Vendredi Saint, ayant « mis fin à 30 ans de guerre civile en Irlande du Nord » selon la formule consacrée, s’il est un endroit qui incarne aujourd’hui encore ce long conflit, c’est bien entendu Belfast. Car si quelque chose a changé dans cette ville meurtrie, ce n’est certainement pas la misère ni la permanence des murs érigés entre quartiers protestants et catholiques, mais plutôt le fait que des millions de touristes se pressent chaque année lors de voyages organisés pour y mater les fresques peintes à la gloire de tel ou tel martyr. Avant d’aller peut-être faire un tour du côté des célèbres jardins botaniques belfastois, ou plus certainement du musée du Titanic inauguré en 2012 pour le centenaire de son naufrage, à l’endroit même où le paquebot fut construit.

Et puisqu’il est ici question d’un Titanic faisant la fierté de ses habitants, autant filer la métaphore avec les ravages d’une société techno-industrielle qui semble presque laisser tout un chacun démuni. Ou pas. Ces derniers mois, au cœur même de la capitale nord-irlandaise, quelques anonymes ont en effet tenu à se rappeler au bon souvenir de l’iceberg technologique, en le frappant à cinq reprises.
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Munich (Allemagne) : feu au chantier du métro du pôle scientifique

Bien qu’il ait passé les dix dernières années de sa vie à Paris, on oublie souvent du côté de la grise capitale française que le célèbre peintre Vassily Kandinsky avait débuté ses recherches picturales en Allemagne. Et plus précisément à Munich, au pied des Alpes bavaroises. De cette période initiale de l’un des futurs fondateurs de l’art abstrait, on retient souvent la toile Der blaue Reiter (le Cavalier bleu, 1903), qui sera aussi le nom du cercle expressionniste auquel il participa un peu plus tard, et forcément beaucoup moins son tableau titré München-Planegg I (1901), qui représente un paysage de campagne plus classique.

Un siècle plus tard, le village de Planegg où Kandisky traîna son chevalet de jeunesse, situé à une dizaine de kilomètres à l’ouest de Munich, a bien évidemment beaucoup changé. Ses champs et ses arbres se sont désormais mués en immenses bâtiments d’acier et de béton, abritant notamment un parc industriel d’entreprises de biochimie, des centres de recherche (comme l’Institut Max Planck pour l’intelligence biologique), ainsi qu’un campus universitaire idoine. Et c’est d’ailleurs pour que tout ce beau monde cauchemardesque n’ait plus à emprunter quotidiennement un vulgaire train de banlieue, que le vaste chantier de prolongement de la ligne de métro U6 a été lancé à Planegg en février 2023, avec une inauguration du nouveau tronçon de plus d’un kilomètre prévue pour 2027. Une ligne de métro qui reliera ainsi directement les deux grands pôles scientifiques de la ville, celui de Garching notamment dédié à la physique (qui abrite un réacteur nucléaire à neutrons destiné à la recherche) implanté au nord de la ville, à celui de Martinsried installé à Planegg, plus à l’ouest et consacré à la biologie. Soit une infrastructure de transport-clé « pour tracer la voie de l’avenir vers la Mecque de la recherche à Munich, et de l’ensemble du Land de haute technologie de Bavière », comme l’a déclaré son ministre régional des Sciences lors de la pose de la première pierre d’un chantier estimé à 212 millions d’euros.

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Lyon (Rhône) : feu à la caserne militaire pour le 14 Juillet !

Au petit matin du 15 juillet, après avoir engagé pour la Fête nationale les mêmes effectifs policiers que pendant la récente semaine d’émeutes (soit 45 000 policiers, plus les unités d’élite et les drones), le ministère de l’Intérieur a pu se féliciter du bilan suivant, en baisse par rapport à l’année dernière : 255 véhicules cramés, 62 « incendies de biens » (en banlieue parisienne) et 51 usages d’artifice contre les forces de l’ordre.

Dans la région lyonnaise, où la CRS de choc n°8 et le Raid avaient été dépêchés en renfort, les autorités locales se sont de la même façon satisfaites de la trentaine de voitures incendiées contre une quarantaine en 2022. Sauf que voilà, les chiffres bruts ne diront jamais rien ni du joyeux rapport créé entre les noctambules qui sont sortis cette nuit-là malgré tout, ni des cibles audacieuses qui ont été touchées. Tenez, prenons par exemple la rue Challemel Lacour, à Lyon même, dans le 7e arrondissement.

Là, des feux d’artifice ont effectivement été tirés par des inconnus vers minuit, comme il se doit, à l’opposé de celui officiel de la mairie, lancé depuis l’esplanade de Fourvière et qui commençait de toute façon beaucoup trop tôt. Sauf que tant qu’à faire, dans ce contexte particulier, pourquoi les illuminations sauvages ne pourraient-elles pas aussi joindre l’utile à l’agréable ? C’est donc vers un bâtiment très particulier que ces feux d’artifice ont atterri, en l’occurrence la caserne militaire du 7e régiment d’Artillerie. Lire la suite

Pendant que les uns demandent justice…

Lorsque des anarchistes défendaient il y a fort longtemps que la domination reposait sur de nombreux piliers matériels à portée de main audacieuse, mais aussi sur des mécanismes de soumission constituant autant d’obstacles à tout bouleversement complet des rapports sociaux, ils avaient alors en tête l’oppression religieuse multiséculaire ou l’odieuse figure de l’ « Honnête ouvrier ». Mais ils ne seraient peut-être pas allés jusqu’à imaginer qu’un siècle plus tard, et autant de nouvelles couches de servitude volontaire, cette dernière irait jusqu’à épouser chez nombre de révoltés les traits de la dame aux yeux bandés.

Depuis l’assassinat policier à Nanterre le 27 juin, on a ainsi vu fleurir un peu partout le slogan « Justice pour Nahel », visant à relier ce meurtre d’Etat à tous les précédents, où au contraire de cette fois-ci, aucun flic assassin n’avait jamais été incarcéré en préventive. Ce slogan porteur de tribunaux et de prisons, voire de châtiment divin pour les plus bigots, s’est épanouit autant sur des murs tagués et des vitrines pillées que dans le néant connecté, autant à travers la voix de la famille appelant au calme, que chez les crapules de gôche cherchant des contre-feux à l’émeute destructrice. Justice ? Cette même justice au service quotidien de l’ordre et de la propriété, qui est actuellement en train d’envoyer des centaines d’émeutiers en taule ? Cette même justice qui n’est pas séparable de la police, et en constitue même l’indispensable prolongement à travers l’écrasement journalier prodigué par ses nobles employés du service public : juges, procureurs, greffiers et matons ? Mais ne serait-ce pas plutôt qu’en demandant « justice » à l’Etat après un assassinat policier, comme une sorte de réflexe conditionné, on essaie surtout de pacifier et de canaliser une situation potentiellement explosive, en éliminant d’emblée toute idée de vengeance contre le pouvoir et ses représentants ? Lire la suite

Le chiffre du jour : 89 502 mesures d’espionnage préventif

Parmi les fastidieuses publications que sort chaque année l’Etat français pour offrir un semblant de vernis démocratique, se trouve le rapport annuel de la Commission nationale de Contrôle des Techniques de Renseignement (CNCTR), l’organisme créé en 2015 pour contrôler le bon usage des mesures d’espionnage déployées par lesdits services. Le 15 juin dernier, la sortie de son Rapport annuel 2022 est certes passée un peu inaperçue, mais mérite tout de même d’en extraire quelques infos. Et ce, d’autant plus que ce rapport détaille la panoplie officielle de mesures de surveillance effectuées de leur propre chef, en amont et à titre préventif, par l’ensemble des services de renseignements, en nous laissant imaginer comment cette inflation peut ensuite se traduire en surveillances supplémentaires prolongées dans un cadre non plus administratif mais judiciaire (sous forme d’ouverture d’enquête préliminaire ou d’instruction dont l’intéressé.e n’aura pas immédiatement connaissance).

Pour commencer, rappelons tout de même la liste des services concernés par les chiffres qui vont suivre, et qui sont la Direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE), la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI), la Direction du Renseignement et de la Sécurité de la Défense (DRSD), la Direction du Renseignement militaire (DRM), la Direction nationale du Renseignement et des Enquêtes douanières (DNRED) et l’unité de Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits financiers clandestins (Tracfin), auxquels s’ajoutent les services dits du second cercle, à savoir la Direction du Renseignement de la Préfecture de Police de Paris (DRPP) ; le Service central du Renseignement territorial (SCRT, ex-RG), la Sous-Direction de l’Anticipation opérationnelle (SDAO) et le Service national du Renseignement pénitentiaire (SNRP). Et précisons aussi que ces chiffres sont bien entendu la partie émergée de l’iceberg, soit ceux inscrits dans le cadre « légal » du contrôle par la CNCTR, et pas la réalité brute dans sa complexité qui est évidemment supérieure. Lire la suite

Brochure : Contre le phagocytage des luttes par les Soulèvements de la Terre

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Deux zozo.e.s d’Ariège, Contre le phagocytage des luttes par les Soulèvements de la Terre, 5 pages, A4, avril 2023


[Phagocyter v. tr. : absorber et détruire]

L’objectif de ce texte est de mettre en garde contre les pratiques, les objectifs, et la ligne politique des Soulèvements de la Terre. Il s’appuie sur une connaissance directe des luttes à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes jusqu’en 2018, où les futurs leaders des Soulèvements s’étaient illustrés, et sur plusieurs témoignages récents de personnes s’étant rendues à des événements organisés par eux. Il n’a pas pour but de décourager quiconque de se rendre à ces événements, mais vise à partager certaines inquiétudes et certaines méfiances, en particulier d’un point de vue anti-autoritaire.

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Les chefs des Soulèvements de la Terre (« Benoît Feuillu » ou « Basile Dutertre » par exemple) sont donc ceux-là même qui, à la ZAD, sont parvenus à transformer et à contrôler la lutte à leur profit, avec des méthodes souvent brutales voire violentes. À la tête d’un groupe nommé CMDO, ils se sont peu à peu présentés comme les représentants du mouvement d’occupation dans son ensemble, tout en refusant de participer aux réunions et assemblées de lutte. Ils ont promu l’ « unité » avec les organisations réformistes au nom d’un pragmatisme politique qu’ils appelaient « stratégie ». Après l’annulation officielle du projet d’aéroport, en janvier 2018 – le succès d’une lutte de plusieurs décennies – ils ont proclamé la « victoire » et, en fin de compte, organisé la liquidation de la ZAD comme mouvement. Ils ont accepté de négocier avec l’État, non pas en leur nom propre mais au nom de tous, ce qui leur a permis d’obtenir pour eux-mêmes des maisons et des terres légalement, avec même une clause où ils s’engageaient à dénoncer aux services de l’État toute occupation illégale et à ne pas s’opposer à leur expulsion. Les récalcitrants ont été intimidés, menacés et violentés. Sur toute cette séquence, et la lutte qui l’a précédée, nous vous conseillons la lecture de l’excellent texte Réflexions à propos de la ZAD, une autre histoire (référence en fin de texte). Lire la suite

Crapules & Assassins (dans la prairie, 25 mars 23)

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Les assassins assassinent. Souvent, ça rate. Et les gueules cassées sont innombrables aujourd’hui et hier. Mais ça ne rate pas toujours. Parfois, les assassins assassinent. Toustes les blessé.e.s, les torturé.e.s et les assassiné.e.s sont à venger. Et on se vengera.

On ne dira évidemment rien contre les personnes qui décident de s’affronter aux assassins avec des moyens qu’elles choisissent elles-mêmes. Mais on dira des personnes qui programment un assaut en n’y étant pas physiquement elles-mêmes en première ligne, qu’elles sont des crapules.

Le programme était écrit par avance. Par exemple sur la page média d’un mouvement qui appelait au rendez-vous du 25 mars 2023 : « impacter concrètement les projets de bassines et leur construction. » Communication crapuleuse. Là, il n’y a rien à saboter, pas même un engin de chantier. Seul, un trou vide, fermé par des grilles. Et pour couper une canalisation, faut-il rassembler quelques milliers de personnes à la même heure au même endroit ? D’ailleurs, la novlangue dit : « désarmer une canalisation ». (S’il s’agissait d’un bavardage sans conséquence dans la réalité, on trouverait ça marrant.) Les conditions favorables à un sabotage sans dommage pour qui l’entreprend sont évidemment inverses. Lorsque ni les flics ni les caméras de tous bords ne débitent à tours de bras, bref lorsque ni les uns ni les autres n’y sont. À l’heure de la lune, choisie en toute discrétion. Donc, programmer un assaut dans la prairie contre les flics pour franchir leur ligne. Et puis ? Planter un drapeau dans le trou vide ? Mettre en déroute les assassins, planter nos tentes, apporter du bois et y construire des cabanes et des palissades ? … Une fête était également au programme le samedi soir, au retour de l’assaut. Et certain.e.s ont osé un « on fête la victoire ! » et mis du son, mais la fête n’a pas pris. Lire la suite

Cinq contre un

Scorpion, acronyme de Street Crimes Operation to Restore Peace in Our Neighbourhoods, est le nom d’une unité spéciale de la police de Memphis, créée l’année dernière et chargée de faire la pluie et le beau temps dans les quartiers de Memphis : massacrer, arrêter et réprimer les personnes qui ont l’infortune de ne pas avoir la peau de couleur blanche aux États-Unis d’Amérique.
Il y a quelques heures est sortie une vidéo dans laquelle un jeune homme afro-américain nommé Tyre Nichols n’est pas simplement arrêté… mais est torturé dans la rue par cinq flics eux aussi afro-américains (sous les yeux imperturbables de quelques pompiers), avec tasers, bâtons, matraques et lacrymo au poivre. Cette torture provoquera sa mort quelques jours plus tard : arrêt cardiaque, tel est le verdict médical. La vidéo ne date pas d’hier, mais du 7 janvier au soir.
La responsabilité de Tyre Nichols cette nuit-là, selon la police ? Conduite non conforme au code de la route. La responsabilité historique de Tyre ? Être Noir dans un ghetto américain.
Les cinq assassins de Tyre ont été immédiatement inculpés et licenciés. Le président démocrate Biden, alors sénateur, se souvient très bien du nom de Rodney King et de ce qui s’était passé en 1992 à Los Angeles. La « non-incrimination » des flics (cette fois-ci tous blancs) filmés par un passant en train de passer le malheureux à tabac provoqua un incendie pendant deux semaines, qui des banlieues de Watts en vint à faire flamber les boutiques de Beverly Hills.
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Comédie tragique

C’est une conseillère du Prince envoyée de l’autre côté de la frontière, qui déclare aujourd’hui être très « choquée ». Grâce à ses affables services, elle ne pensait mériter que prébendes, honneurs, interviews, applaudissements. Jamais elle n’aurait pensé être réveillée en sursaut au milieu de la nuit, parce qu’une de ses voitures avait été livrée aux flammes. Jamais elle n’aurait pensé courir un tel « risque », d’après elle « inattendu ». Au fond, elle est juste une diplomate, la représentante à l’étranger d’un État. Et qui pourrait bien lui en vouloir juste pour cela ?

D’évidence – à Athènes mais pas que –, certains considèrent tout haut-fonctionnaire d’État comme responsable des infamies commises par l’État qu’il représente. Une automobile engloutie par le feu a ainsi suffi pour irriter et perturber les collègues de la diplomate italienne, au point d’en faire une tragédie grecque (bien que, pour l’instant, sans fin mortelle). Parmi ces derniers, il y a ceux qui se déclarent « stupéfaits » face au manque de respect envers les institutions, et ceux qui se disent « inquiets » après avoir découvert n’être pas si inatteignables. Ah bon, la servitude volontaire n’est pas vraiment universelle ? Ah bon, les quartiers hyper-sécurisés construits par des régimes fascistes ne sont pas réellement inaccessibles ?
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