
[Hier lundi 23 juin, est sortie une dépêche de l’agence de presse allemande (dpa) annonçant –à la grande joie des petits et des grands–, que six camions de l’armée allemande sont partis en fumée au cours du week-end à Erfurt (région de Thuringe). Ces derniers étaient garés au nord de la ville, sur le parking d’un atelier d’entretien et de réparation.
Cet incident fâcheux survient au moment où l’État allemand réfléchit au service militaire obligatoire, instaure une Journée des anciens combattants (15 juin), relance la préparation et la militarisation des esprits, et surtout débloque des sommes incommensurables pour la guerre : création d’un fonds spécial d’investissement de 500 milliards d’euros destiné aux investissements dits de “sécurité”, et augmentation de son budget annuel de la défense de 63 milliards en 2025 (2% du PIB) à 160 milliards pour 2030 (3,5% du PIB).
Bref, l’attaque d’Erfurt est venue rappeler si besoin est qu’en Allemagne, tout le monde n’est pas disposé à accepter cette course vers l’abîme militariste, que ce soit à Hambourg le 15 juin lorsque le directeur de l’entreprise d’armement Vincorion a reçu une visite incendiaire à domicile, à Berlin le 10 juin lorsque l’entreprise de puces électroniques Micro Resist Technology a été sabotée, à Berlin le 17 juin lorsque trente-six camionnettes des collaborateurs de guerre Telekom et Amazon sont parties en fumée, ou le 6 juin à Soltau (Basse-Saxe) lorsque cinq camions de l’armée avaient déjà été cramés : une attaque revendiquée le lendemain sur de.indymedia, dont on trouvera ci-dessous la traduction du communiqué.]
Feu contre l’armée fédérale ! – Attaque incendiaire contre des véhicules de l’armée à Soltau (Basse-Saxe, Allemagne)
La guerre et le génocide sont les moyens les plus brutaux utilisés dans la lutte pour le contrôle des ressources, des territoires et des personnes. Ils vont toujours de pair avec la prétention à justifier l’anéantissement massive de vies humaines, les déplacements forcés, le traumatisme collectif et la destruction effrénée.
Cette prétention est au cœur de la logique de guerre et de la militarisation croissante qui apparaît concrètement dans la participation active de l’Allemagne à diverses guerres – notamment en tant qu’un des plus grands pays exportateur d’armes au monde.
Cette prétention est à la base de la « raison d’Etat » allemande qui soutient le génocide à Gaza et la politique inhumaine de l’Etat israélien contre la population palestinienne.
Elle se montre aussi sans aucun masque dans l’ « Operation Prosperity Guardian » – où l’OTAN dégage à coups de bombes des routes commerciales occidentales au Yémen.
Ou encore dans la guerre meurtrière de proxy au Soudan où, largement oubliées par le monde occidental, des dizaines de milliers de personnes meurent et des millions d’autres sont contraintes à la fuite.
Enfin elle se trouve ici dans la propagande en faveur de « l’aptitude à la guerre » qui règne depuis l’agression de la Russie contre l’Ukraine. Nous vivons un impressionnant revival de la rhétorique de la guerre froide.
Cette propagande conduit à un énorme réarmement militaire en très peu temps, ainsi qu’à la militarisation et à la mainmise de l’armée sur les structures civiles et sociales les plus diverses. Elle amènera, tôt ou tard, au retour d’un service militaire (obligatoire).
Du feu contre la froideur libérale !
La condition préalable à un climat social dans lequel toutes ces horreurs peuvent être acceptées comme inévitables et sans alternative, est la déshumanisation des personnes contraintes de souffrir de la guerre, du génocide et des déplacements forcés.
Il ne s’agit pas là d’un simple mécanisme psychologique destiné à ne pas perdre la raison face à toutes ces choses épouvantables. La dépréciation et la déshumanisation d’une grande partie de la population mondiale révèle la continuité d’une manière coloniale de penser et d’agir. Par la guerre et la soumission, celle-ci a engendré la position hégémonique du dit « monde occidental » et de la société bourgeoise. La guerre et la soumission restent des moyens d’assurer cette position hégémonique.
L’ignorance de l’assassinat et de la domination de populations est largement répandue dans toutes les strates de la société allemande. Nous observons une variante de la « raison » qui permet de dévaloriser avec une froideur glaçante et sans empathie des vies humaines considérées comme « autres » et de les mettre à distance de sa propre existence. C’est ainsi que se maintient le statu quo d’une société où on piétine des cadavres pour garantir sa propre prospérité. La brutalité militaire bat son plein !
Du feu en solidarité !
Ces flammes sont pour celles et ceux qui luttent contre leur déshumanisation et pour leur survie.
Ces flammes sont aussi pour celles et ceux qui doutent, qui ne restent pas tranquilles face à la situation, qui ne collaborent pas, n’obéissent pas et refusent de fonctionner. Pour toutes celles et ceux qui veulent rêver et combattre pour un autre monde solidaire, sans États, ni frontières, ni armées.
Ces flammes sont pour Maja, en grève de la faim depuis le 5 juin dans une taule de Budapest, accusée de pratiquer un antifascisme conséquent – ta détermination et ton attitude solidaire sont un moteur et une source d’inspiration pour nous ! Tu n’es pas seule !
Ces flammes sont pour Daniela Klette, incarcérée et actuellement en procès pour son parcours, son attitude et sa praxis révolutionnaires – ton histoire fait partie de notre futur commun !
Ces flammes sont pour celles et ceux qui, s’extrayant du contrôle et des poursuites étatiques, continuent à parcourir notre chemin commun – Amour et force !
Nous sommes en plein dedans, nous sommes au cœur de la bête.
Et il nous revient à toustes de re-décider sans cesse quel rôle nous voulons jouer dans ce cycle sanglant.
Nous avons décidé de contribuer à l’infarctus.
Au cours des prochaines années, l’armée fédérale sera omniprésente dans nos vies et redeviendra un acteur essentiel du formatage autoritaire et patriarcal de la société. Attaquons-la à tous les niveaux !
Dans la nuit du 5 au 6 juin, nous avons mis le feu à cinq poids-lourds de l’armée sur le site d’un atelier dans la rue Carl-Benz, à Soltau.