Archives de catégorie : Réflexions éparses

Switch Off the system of destruction – Eteindre le système de dévastation

[Reçu par mail, 7 octobre 2023]

Switch off! – the system of destruction
(traduit de l’allemand de Switch off !, 13 juillet 2023)

Une vingtaine de personnes prennent d’assaut un chantier de construction du gazoduc Coastal Gas Link dans l’ouest du Canada. Armées de haches et de fusées éclairantes, elles menacent les employés, volent les poids-lourds, s’en servent pour détruire le bâtiment du chantier et finissent par démolir les véhicules mêmes. Les dégâts se chiffrent en millions. C’était il y a près d’un an. On ne sait toujours pas qui a saboté la construction du gazoduc dans la province de la Colombie-Britannique. Le gaz fracturé devait bientôt être acheminé par ce gazoduc, qui traverse des terres autochtones, jusqu’à la côte ouest, d’où il serait expédié vers l’Asie.

Un appel…

Que vous occupiez des universités, des écoles, des arbres ou des rues. Que vous passiez vos nuits à vous inquiéter ou à saboter. Que vous fassiez la grève ou que vous écriviez sur le sujet.

La certitude que le système actuel entraînera l’effondrement de l’écosystème fortement endommagé a déjà poussé d’innombrables personnes à entrer en résistance. Des dizaines de milliers de personnes descendent dans la rue contre le « business as usual » de la machinerie capitaliste, les gens s’opposent en masse aux grands projets destructeurs, les infrastructures du système sont bloquées et des combattantes courageuses mettent le feu aux machines qui sont utilisées pour les priver de la base même de la vie. Ce dont nous avons besoin dans la lutte contre la dévastation de la nature et la misère sociale qui en découle, c’est la quête commune d’une véritable rupture révolutionnaire et de la liberté pour toutes et tous. La poursuite d’une initiative qui rejette tous les compromis et les corrections cosmétiques de l’État et qui entraîne une transformation de nos relations sociales. Parce que la dévastation de la planète par le système économique néolibéral est inextricablement liée aux schémas de pensée patriarcaux, au racisme et au colonialisme. L’initiative doit nécessairement venir d’en bas. Des luttes des exclus. Des luttes de ceux qui mettent en œuvre une solidarité auto-organisée contre les promesses de salut de l’État. Des luttes de celles qui voient qu’il ne peut y avoir de compromis dans la lutte contre la destruction systémique de la biosphère.
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La guerre commence ici

La guerre commence ici : paralysons son infrastructure,
là où nous le pouvons

traduit de l’allemand de zuendlappen, 9 février 2022

Il est difficile d’évaluer la situation actuelle en Ukraine d’un point de vue politique. Le tout ne relève-t-il que du traditionnel concours de bistouquettes de quelques militaires et politiques mégalomaniaques et va-t-en-guerre, ou la guerre va-telle effectivement advenir ? Ce texte [sorti deux semaines avant le début de l’invasion russe] laisse ces questions de côté pour plutôt se consacrer à celles qui, dans notre perspective, font plus sens : comment est-il possible de saboter un conflit militaire, une guerre, une éventuelle guerre de l’OTAN ? De par sa nature, ce texte ne peut tout au plus donner que quelques pistes et notre intention n’est absolument pas de présenter des solutions toutes faites, mais juste de poser quelques idées sur la table.

Nous publions ce texte sur internet, parce que nous voulons partager ces réflexions avec le plus grand nombre possible de compagnon-ne-s, avec lesquels il nous serait impossible de rentrer personnellement en contact pour discuter de ces questions. Nous pensons cependant que tout approfondissement (stratégique) de ce débat ne devrait pas avoir lieu sur internet, avant tout parce que cela sert à la répression et que cela n’aurait presque aucun avantage pour celles et ceux qui sont de toute façon déterminé-e-s à employer leur énergie créatrice pour mener plus loin quelques-unes des idées esquissées ici.

Pour certain-e-s, les informations présentées ici ne seront pas une nouveauté. En fin de compte, la majeure partie de tout cela est clair et bien connu. Nous pensons pourtant qu’il vaut la peine de se rappeler quelques détails de la logistique militaire qui, dans les débats autour de guerres lointaines, sont peut-être un peu passés à l’arrière-plan.
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Un souhait

Ah ! Ah ! C’est le jour de l’an !

La voix claire de l’enfant et la voix cassée du vieillard entonnent la même ballade : la ballade des vœux et souhaits.

L’ouvrier à son patron, le débiteur à son créancier, le locataire à son propriétaire disent la ritournelle de la bonne et heureuse année.

Le pauvre et la pauvresse s’en vont par les rues chanter la complainte de la longue vie.

Ah ! Ah ! C’est le jour de l’an !

Il faut que l’on rie ! Il faut que l’on se réjouisse. Que toutes les figures prennent un air de fête. Que toutes les lèvres laissent échapper les meilleurs souhaits. Que sur toutes les faces se dessine le rictus de la joie.

C’est le jour du mensonge officiel, de l’hypocrisie sociale, de la charité pharisienne.
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Quand ils frapperont à la porte…

«When they kick at your front door 

How you gonna come? 

With your hands on your head 

Or on the trigger of your gun…»


Début décembre
, un des télé-virologues les plus appréciés des journalistes déclarait que la liberté de choix est un problème que le pouvoir devrait résoudre. Que ceux qui s’obstinent à ne pas obéir volontairement devraient être contraints de le faire de force. Que la liberté de ne pas se faire vacciner, par exemple, ne peut exister que pour un ermite qui vit seul au milieu du désert. Quant aux autres, citoyens de la société, « évidemment il n’y a pas d’alternative pour ces gens à l’obligation, mais à l’obligation, celle sérieuse, c’est-à-dire l’obligation qui t’envoie les carabiniers chez toi pour te prendre ». L’affirmation péremptoire a fait pouffer de rire la journaliste de service qui l’accueillait (et pas pour son italien laborieux).

Une semaine plus tard, le général d’armée auquel le gouvernement a confié la tâche de guider la guerre contre le redoutable virus a déclaré que lui et ses troupes sont prêts : en même temps que le Père Noël, il « fera les vaccinations maison par maison ». En plus des personnes âgées perdues dans les villages les plus reculés, les militaires sont « prêts à vacciner tout le public » — le public des enfants…

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[Affiche] : L’humanité est un risque à courir

traduit de l’italien de Disordine, 10 septembre 2021

L’humanité est un risque à courir.
Contre le green pass, l’obligation vaccinale et beaucoup d’autres

Nous avons compris depuis longtemps que les différents problèmes qui se présentent dans ce monde ne sont pas déliés. Un monde en guerre présente son compte de misères, de morts, de personnes en fuite. Une planète exploitée et polluée, présente son compte en termes de changements climatiques, de dévastation de la nature, de maladies et encore de personnes en fuite. Dans un monde où l’accumulation de richesses signifie accumulation de pouvoir, ce qui en découle est l’exclusion et la répression de ceux qui ne peuvent pas accéder à ces richesses. Ces arguments, qui ont été répétés depuis des siècles, ne semblent pas saisir le signe d’une période où, ce qui se passe, sont toutes les conditions décrites, de manière accélérée et exponentielle. Les discours prononcés autour de la pandémie, de la santé et de la gestion répressive et marchandisée qui s’en suit, comment pourraient-ils être séparés de tout le reste ?
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Tract : Pass sanitaire ? Tout bloquer

Green pass ? Tout bloquer
traduit de l’italien de finimondo, 1er septembre 2021

S’abstenir de ce qui a la tête sur les épaules, régler son pas sur celui des tempêtes disait un adage d’il y a quelques temps.

Aujourd’hui, mercredi 1er septembre, une invitation à bloquer les trains a été lancée dans différentes gares du pays pour critiquer l’obligation du green pass*, nécessaire pour ceux qui veulent voyager sur certains moyens de transport. Que pourrait-il  se passer lorsque le train de la résignation à la coercition s’arrêtera, sur la vague du « si je ne peux pas me déplacer, personne ne se déplace » ?

Quand une antenne-relais du contrôle télématique est attaquée, quand un centre vaccinal est saboté, quand un virologue qui demande le confinement de ceux qui ne se vaccinent pas est bousculé dans la rue, quand une table de parti est renversée, quand on a la brillante idée de commencer à bloquer le déplacement des humains-marchandises, combien d’autres possibilités peuvent émerger ? Quand une protestation naissante contre le green pass et la disciplinarisation de la circulation des personnes ouvre des espaces à chacun, sans leadership ni services d’ordre, pouvons-nous commencer à développer des contenus qui mettent en évidence les contradictions sociales, en réponse aux contrôles toujours plus asphyxiants sur nos vies ?

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Hambourg (Allemagne) : une analyse du dossier des « Trois du banc public »

Espionnages et autres désagréments
traduit de l’allemand de de.indymedia, 29 août 2021

Une analyse de la mise sous observation et de la surveillance des trois anarchistes condamné-e-s dans le dit « Procès du banc-public ».

Dans le texte qui suit nous voulons essayer de résumer les surveillances et les mesures d’investigation autour de la « procédure du banc-public » ainsi que d’expliciter certains points qui peuvent être importants pour des personnes grandement intéressées à préserver leur sphère privée.

Nous voulons d’abord souligner que tout ce qui suit est basé sur les dossiers des keufs et sur les conclusions que nous en avons tirées. De par sa nature même, l’appareil sécuritaire ne montre pas volontiers son jeu et même dans les procédures criminelles, il ne présente ouvertement que les éléments de ses rapports qu’il croit absolument indispensables. La publication de tous les procès-verbaux de surveillances demandée par les avocat-e-s a été, comme attendu, refusée. Par conséquent, nos comptes-rendus sont aussi incomplets. Tirez en vos conclusions et vos enseignements, mais ne considérez rien comme des vérités établies – nous racontons ici une histoire que les keufs ont compilée dans un dossier !
Dans un souci de simplification nous caractériserons les accusé-e-s comme personne 1, 2 et 3, dans leur ordre d’apparition en scène.
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Rien n’est fini ! Quelques réflexions depuis le Chili…

[traduit de l’espagnol du numéro spécial de Confrontación, périodique anarchiste apériodique (Chili), octobre-novembre 2020, 4 p.]

Rien n’est fini !
Nous restons en révolte contre toute autorité

À un an du début de la révolte qui s’est déchaînée au Chili depuis le 18 octobre 2019, nous continuons à diffuser Confrontación.

Saluant toutes celles et ceux qui sont resté-e-s actifs et actives dans la lutte contre l’ordre établi avant, pendant et après la dite «explosion sociale» nous restons dans la rue avec un nouveau numéro sur papier.
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Chili : une lettre de Mónica depuis la prison de San Miguel (mis à jour)

traduit de l’espagnol de Contrainfo, 2 août 2020

Santiago du Chili, début août 2020

Prison de San Miguel,
31 juillet 2020

Compagnon.ne.s, ami.e.s et proches,

Je vous écris à nouveau depuis une cellule. Je suis enfermée dans la prison de San Miguel, et resterai isolée pendant 14 jours selon le protocole de prévention de la contagion de la Covid-19, ensuite ils décideront dans quel régime me classer et me placeront dans un module définitif.
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Rien, à Nantes

traduit de l’italien de finimondo, 18 juillet 2020

Depuis combien de temps ils nous disent, ils nous répètent, ils nous préviennent que rien ne sera plus comme avant ? Que nous sommes en train de traverser une période historique inédite, en devant affronter des événements qui changeront totalement notre vie, dans ses aspects majeurs comme mineurs ?
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Invisible mais vrai

Il n’aura pas échappé à certains que les Champs-Elysées en flammes de samedi dernier peuvent être considérés comme une magnifique commémoration de la Commune de Paris. Qui sait combien y ont pensé. «  Paris respirait !… Partout s’agitait une vie intense… Adieu au vieux monde et à la diplomatie » écrivait Louise Michel à propos des événements qui ont débuté le 18 mars 1871 à Paris. « La Commune a été la plus grande fête du XIXe siècle » – commentèrent un siècle plus tard les situationnistes. « Ça a été fantastique, d’une joie impressionnante » – nous a écrit un anonyme compagnon à propos du 16 mars 2019 à Paris. L’ivresse de la révolte, dans l’assaut contre le pouvoir et ses petites mortifications quotidiennes, est un plaisir qui n’a pas besoin de chefs… Ah oui, au fait, et les chefs ?

Quelle tristesse, même les leaders révolutionnaires ne sont plus ceux d’autrefois. Si le 18 mars 1871 l’aspirant général de l’insurrection Blanqui ne put participer au soulèvement, c’est parce qu’il se trouvait en prison. Craignant son influence sur un climat social désormais incandescent, le chef du gouvernement Thiers avait pris des mesures et l’avait fait arrêter la veille. Eh bien, il semble que le 16 mars 2019, même l’autoproclamé héritier de Blanqui n’a pu (tenter de) chevaucher la révolte dans les rues de Paris. Mais pour une raison bien plus vulgaire : il était (et est toujours) en tournée à travers l’Italie pour vendre sa marchandise imprimée.
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Possibilités sans mesure

Il y a ceux qui regardent les révoltes et les sabotages qui sont en train de se passer en France avec un regard langoureux, et ceux qui en saisissent les possibilités. Il y a ceux qui restent au large, et ceux qui veulent stimuler les événements. Il y a ceux qui ne se sentent pas d’intervenir, et ceux qui pensent qu’être là où l’ennemi ne t’attend pas incarne la perspective de ne pas renoncer à l’irrévérence et à la furie iconoclaste : pour pousser ce monde à sa perte, plutôt qu’à sa gestion réaliste et prudente.

Lorsque la révolte se généralise, elle devient une revanche contre ce qu’on a toujours vu de loin. Toute marchandise volée, toute technologie interrompue, tout lieu du pouvoir abattu permettent non pas de reconnaître leur valeur d’usage et d’échange, mais la destruction de ce qui est distant. A travers le pillage de ce qui nous emprisonne, ce sont également les bases de la communication policière qui sont attaquées. Dans la révolte on aime avec passion et on hait à l’infini.
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A quoi sert l’énergie ?

« Ils protestent contre l’énergie qui passe devant leur maison, mais ils la veulent bien chez eux ! » s’époumone ces jours-ci un philistin national-populaire face à ce qui est en train de secouer un petit village des Pouilles et de s’amplifier dans le reste de la région. Les affrontements entre forces de l’ordre et opposants se déroulent devant le site qui accueillera le chantier du Tap (Trans-Adriatic Pipeline), un gazoduc de 3000 kilomètres qui partira d’Azerbaïdjan jusqu’en Turquie (Tanap: Trans-Anatolian Natural Gas Pipeline), avant de passer en Grèce et en Albanie, de traverser la mer adriatique et d’accoster sur le littoral de Lecce. Dans cette lutte où il n’est pas toujours facile de comprendre où finit la raison et où commence le prétexte, le Salento n’est pas tout seul.

Standing Rock, par exemple, est une réserve indienne dans le Dakota du Nord, aux Etats-Unis. Hythe en revanche, est un petit village de moins de mille âmes, perdu au nord de l’Alberta, au Canada. Si on quitte le nouveau continent pour se déplacer en Europe, on tombe en Allemagne sur Niederzier, une commune de 15 000 habitants en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. En France aussi, nous viennent en tête plusieurs endroits, comme la Haute-Durance, dans les Hautes-Alpes, à la frontière avec le Piémont. Ou encore de petits bourgs en Bourgogne, en Haute-Vienne, dans la Loire, ou encore non loin de Paris. Tandis qu’en Finlande on pourrait citer Pyhäjoki ou le golfe de Botnie. Quel est le fil noir qui réunit tous ces points géographiques ? Pas seulement le fait que là aussi soient en construction – ou déjà en activité depuis des années, comme dans le cas allemand – des installations pour exploiter des ressources énergétiques, mais que ces projets voulus et imposés d’en haut rencontrent de fortes résistances d’en bas, avec des formes de lutte qui sortent souvent de l’étroitesse du légalisme pour déboucher sur une révolte ouverte (passant de la tristesse des pétitions à l’ivresse du sabotage). Pourtant, en tant que synonyme de force qui permet à la vie de se manifester, l’énergie ne court quasi pas le risque d’être remise en question. Tous la réclament, parce que personne n’aime la faiblesse, l’immobilisme, la paralysie (qui accompagnent le manque d’énergie). Ceci fait que l’accumulation d’énergie, l’extraction et l’exploitation de ses sources soit universellement perçu comme une évidence, toujours positive et donc bienvenue. On peut critiquer le recours à une source d’énergie particulière, jugée empoisonnante et dangereuse – comme celle atomique – mais pas le besoin en soi d’énergie. Ceci explique pourquoi d’un côté beaucoup d’opposants tendent plus à critiquer l’arrogance décisionnelle et les choix techniques portés par les différents projets énergétiques plutôt que leur objectif, et d’un autre côté que les concepteurs de ces projets affichent une sacrée stupeur chaque fois qu’on ose entraver ce qui à leurs yeux représente plus ou moins la continuation de la vie sur terre.

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