Yaté (Nouvelle-Calédonie) : sabotage de la mine de nickel après le saccage de son usine

Les dégâts sont lourds après l’incendie sur la mine de Goro
Nouvelle-Calédonie1ere, 15 décembre 2020

Après l’incendie qui a ravagé plusieurs installations du centre industriel sur la mine de Goro, l’heure est au bilan. Vale NC dénonce un acte de vandalisme. Une enquête est ouverte pour incendie volontaire.

Vale NC n’en est pas à son premier incident du genre. Cette fois-ci encore, les flammes ont fait de gros dégâts. L’incendie de ce lundi 14 décembre a ravagé un stock de pneus, une partie du bâtiment administratif ainsi qu’un côté des ateliers de maintenance et du magasin d’outillage. Les reconnaissances effectuées en fin de journée par les équipes de Vale NC montrent qu’il s’agit d’un acte de vandalisme. Le procureur indique qu’une enquête est ouverte pour incendie volontaire.

 » Des individus qui bloquent le site depuis plusieurs semaines, ont incendié hier soir des installations du centre industriel minier notamment des bureaux, une réserve d’huile et des pneus. Donc ce sont des actes de vandalisme et des dégradations extrêmement graves. Avant de mettre le feu, des dégradations ont été commises, notamment une tranchée ainsi qu’une coupure de l’arrivée d’eau pour ralentir l’intervention des sapeurs-pompiers  »
Denis Loustalet, directeur hygiène sécurité et environnement à Vale NC

Plusieurs engins ont été également été touchés par les flammes. Selon Robert Atiti, président du GIE des entreprises de Yaté, une dizaine de véhicules légers a brûlé, ils appartenaient à l’industriel et à ses sous-traitants. Les plus gros engins étaient des véhicules réformés. Vale NC n’a pas encore communiqué une évaluation chiffrée des dégâts.

« Pour augmenter les dégâts, des vannes ont été ouvertes sur des cuves d’huiles et d’hydrocarbures c’est pour ça que depuis ce matin, nous travaillons en étroite collaboration avec les services spécialisés de la sécurité civile pour contenir cette pollution »
Denis Loustalet

La sécurité civile a mis en oeuvre des moyens maritimes, aériens et terrestres pour une reconnaissance du risque environnemental. Des experts de la brigade d’intervention de l’usine ont également travaillé sur place pour limiter l’impact sur l’environnement, en positionnant des barrages sur le cours d’eau ou à l’embouchure de la baie de Kwé.

À 17h45 ce mardi soir, la sécurité civile indique que ces missions de reconnaissance, menées tout au long de la journée à l’aide de drones et de l’hélicoptère de la sécurité civile, confirment la présence de traces résiduelles d’huiles dans le lit de la rivière Kwé. « Pour l’instant, aucun impact sur la faune et la flore n’a été observé. Des prélèvements ont été effectués à différents points de la rivière, afin de quantifier la concentration de la pollution dans l’eau. » Le site reste sous surveillance, les investigations se poursuivront demain si nécessaire.

Dans un communiqué envoyé ce mardi, la province Sud indique qu’elle a déposé une plainte contre « ces actes criminels et le fera systématiquement chaque fois que ses intérêts seront touchés. »


Trois jours avant la mine : le saccage de l’usine
Usine du Sud [nickel et cobalt]: des dégâts et des pertes pour plus de trente millions d’euros

C’est l’usine de nickel la plus chère au monde, elle a coûté prés de dix millars de dollars. Les dégradations commises jeudi dernier sont encore visibles alors qu’un nouvel incendie s’est déclaré ce lundi. La production de nickel et de cobalt ne reprendra pas avant au moins deux semaines.

A Goro, en Nouvelle-Calédonie, à soixante kilomètres de Nouméa, l’usine du Sud de Vale est un site classé Seveso qui transforme le nickel et le cobalt de qualité batterie par hydrométallurgie à l’acide sulfurique. Le site a été évacué et placé sous protection des gendarmes qui ont du faire usage de leurs armes, jeudi 10 décembre, après une prise d’assaut du site industriel et des intrusions dans les locaux.

Une première estimation des dégâts causés au site industriel est estimée à plus de vingt millions d’euros par la direction de l’usine du Sud (Vale-NC). La production de nickel et de cobalt, interrompue pour au moins deux semaines, entraînera une perte supplémentaire d’au moins dix millions d’euros, ce qui tombe au plus mauvais moment car le cours des métaux industriels est au plus haut. L’usine calédonienne produit un ingrédient rare pour le secteur de la transition énergétique automobile.

Une usine déserte, et à l’intérieur des voitures et des engins miniers saccagés, des bureaux administratifs incendiés, tel est le constat, fait sur place, par des journalistes de Nouvelle-Calédonie 1ère. Trois cents salariés qui se trouvaient dans l’usine du grand Sud, au plus fort des violences survenues jeudi ont été évacués. La centrale électrique et l’usine d’acide sulfurique servant à l’extraction par hydrométallurgie du nickel et du cobalt ont été arrêtées, et pour l’usine d’acide selon la procédure d’urgence prévue, devant les risques potentiels d’explosion. Le site calédonien est classé Seveso, à haut risque industriel, selon la directive européenne qui impose d’y maintenir un haut niveau de prévention.

En conséquence, la production de nickel et de cobalt destiné aux batteries des voitures électriques est interrompue, le stock de minerai étant épuisé. La route d’accès à la mine « a été défoncée avec un bulldozer conduit par un émeutier », a par ailleurs indiqué un cadre de Vale-NC, sous couvert d’anonymat, à Outre-mer 1ère.

« La procédure engagée devrait permettre de garantir un état stable, avant un éventuel redémarrage qui interviendrait d’ici deux à trois semaines » a précisé Didier Ventura, directeur général délégué de Vale-NC interrogé par Laura Shintu et Cédric Michaud de Nouvelle-Calédonie 1ère. La direction de l’usine du Sud assure que le site est en sécurité et qu’il ne présente aucun danger pour l’environnement.

Sur place, un calme encore précaire est revenu, aprés les violences de jeudi, mais l’usine reste toujours sous la protection de la gendarmerie. La maintenance des équipements, et notamment ceux de l’usine d’acide sulfurique, est assurée par des salariés de Vale-NC. Toutefois, ce lundi soir à Nouméa, lundi matin à Paris, un incendie était en cours sur le site de la mine de Goro, celle de l’usine du Sud.  L’odeur des fumées, peut-être des pneux brulés d’engins miniers, était perceptible jusqu’au Mont-Dore dans la banlieue de Nouméa.


Et  ce même jeudi 10 décembre plus au nord à Kouaoua
SLN, la serpentine brûlée sur 3km
RBB

La SLN aussi est victime des blocages et exactions. Cette nuit, le convoyeur de Kouaoua, qui achemine le minerai vers la mer pour qu’il soit ensuite traité à l’usine de Doniambo a de nouveau été incendié. La bande de la serpentine a brûlé sur 3km et la structure métallique sur 1,5km. Elle est donc hors d’état de marche. Une enquête est en cours.

Dans un communiqué, la SLN dénonce cette nouvelle attaque contre le centre minier de Kouaoua qui impacte directement plus de 300 emplois, 5 mois seulement après la reprise d’activité sur ce site qui avait été rendue possible par un dialogue intense et des engagements de l’ensemble des parties prenantes.

La SLN rappelle par ailleurs qu’elle subit un blocage de l’ensemble de ses sites miniers depuis plusieurs jours, et elle s’inquiète très vivement du manque d’alimentation en minerai de l’usine de Doniambo. Une situation d’urgence qui pourrait aboutir à une baisse de la puissance des fours d’ici la fin de la semaine, qui entrainerait inévitablement une baisse de la production.