Meylan (Isère) : couper le jus du technopole numérique



Nouveau sabotage électrique : Inovallée visée à son tour ?

Le Dauphiné, 14 avril 2022

Après les grandes entreprises de haute technologie du bassin de Crolles la semaine dernière , c’est très probablement Inovallée, principal parc technologique de la région grenobloise, qui a été la cible, mercredi, d’une nouvelle action de sabotage menée sur une installation électrique . Une action de dégradation qui, selon nos informations, ne fait pas de doute, le procureur de la République de Grenoble ayant par ailleurs, deux heures après les faits, confirmé au Dauphiné Libéré que l’hypothèse d’un « acte criminel » était privilégiée.L’incendie s’est déclaré vers 15 h 30 dans l’enceinte même d’un poste source haute tension d’Enedis situé au 19, chemin du Vieux-Chêne à Meylan. Une installation placée entre des immeubles d’entreprises et l’A 41, en plein cœur d’une technopole d’environ 380 entreprises axées sur le domaine des technologies numériques.

« Certaines personnes ont entendu un bruit d’explosion », indiquait sur place Philippe Cardin, le maire de Meylan, une heure environ après le début du sinistre. Il semble que le feu ait été bref et très limité, mais il a mis hors d’usage l’un des deux groupes du site dont la fonction est de transformer la haute tension en moyenne tension (20 000 volts). Le résultat a été immédiat : environ 10 000 clients (particuliers et entreprises) ont été privés d’électricité dans six communes : Meylan et Montbonnot principalement, ainsi que Saint-Martin-d’Hères, Gières, Saint-Ismier et Biviers. Mais selon Enedis, « cette coupure n’a duré que quelques minutes, grâce à des opérations effectuées à distance » et le courant a été très vite rétabli pour tous les clients concernés.


Des risques importants

Les gendarmes de la compagnie de Meylan ont bouclé le secteur et ont débuté les investigations par l’intermédiaire de la brigade de recherches de l’unité. Mais très rapidement, ce sont leurs collègues de la section de recherches de Grenoble – qui enquêtent depuis 2017 sur tous les dossiers de sabotages en zone gendarmerie attribués à l’ultra-gauche libertaire – qui ont été saisis par le parquet.

Sur le plan purement opérationnel d’abord, cette nouvelle action directe est calquée sur les incendies précédents de Froges (le 4 avril) et du pont de Brignoud (5 avril). À Froges comme à Meylan, les saboteurs se sont apparemment facilement joués des grilles d’enceinte des postes visés (de RTE à Froges, d’Enedis à Meylan), et ont ciblé un lieu précis de l’installation. Mais si l’attaque du poste de Froges a été réalisée au cœur de la nuit, sur un point situé, qui plus est, à l’abri des regards une fois l’enceinte franchie, les auteurs de l’incendie de Meylan ont très certainement pris des risques importants, le site se trouvant à proximité immédiate d’immeubles d’entreprises et cela, en plein après-midi. Par ailleurs, après avoir escaladé les grilles, les auteurs étaient toujours facilement visibles depuis ces bâtiments et leurs parkings, le lieu précis du sabotage se trouvant immédiatement derrière l’enceinte constituée d’un simple grillage non équipé de pare-vues.

Outils d’asservissement

Sur le plan stratégique ensuite, cette action paraît s’inscrire dans une logique évidente d’atteinte successive à des objectifs prédéterminés : après STMicroelectronics (composants microélectroniques) et Soitec (semi-conducteurs entrant dans la composition de puces électroniques), ce seraient donc les entreprises de pointe développant des technologies de l’information et de la communication qui seraient visées.

De fait, depuis le milieu des années 2000 et la construction de Minatec à Grenoble, les hautes technologies sont une cible privilégiée des groupuscules de l’ultra-gauche libertaire, qui voient en elles d’insupportables outils d’asservissement et de « flicage » de l’individu. Il n’est pas interdit de penser par ailleurs que cette succession d’actions visant à désorganiser le tissu économique, au risque de pénaliser les dizaines de milliers de personnes dans leur vie quotidienne (l’incendie du pont de Brignoud en est un exemple), a été sciemment organisée à un moment clé, c’est-à-dire en pleine période électorale.