(Traduit du catalan de barcelona.indymedia, 28 avril 2024)
Le 17 avril des câbles de fibre optique ont brûlé près de Lleida [ndt : une ville à l’ouest de la Catalogne]. Cela a privé d’internet et, dans beaucoup de cas, de téléphones portables quelques 60 000 personnes réparties sur 25 municipalités de la province de Lleida. La presse parle aussi d’un « incident » simultané à Bell-lloc d’Urgell, à 15 km a l’est en suivant l’autoroute de Barcelone, sans donner plus de détails. Quant à l’origine du feu, la presse et la police annoncent qu’il est intentionnel. Deux jours après l’incendie, celui-ci n’a pas été revendiqué.
Il ne s’agit pas de parler à la place des incendiaires, mais commenter les faits et leurs conséquences semble intéressant. Pour commencer, même si la presse et la police admettent que le feu est intentionnel, elles semblent réticentes à annoncer qu’il s’agit d’un sabotage et suggèrent que cela pourrait être une tentative de vol de cuivre. Cette idée semble un peu surprenante, puisque les câbles de cuivre et la fibre optique sont deux choses différentes, et il semble étrange de mettre le feu à ce qu’on veut voler. De plus, il y a eu deux « incidents » la même nuit dans des endroits différents. On peut plutôt supposer (et on veut croire) que celle/celui qui a mis le feu savait ce qu’iel faisait, car les premières photos de el Segre [ndt : un journal local] et d’autres journaux montrent que le lieu de l’incendie est à l’extérieur de la ville et qu’il faut soulever un couvercle pour voir les câbles. De plus, en cherchant dans les archives de la presse locale, on peut lire qu’au mois de juillet [2023] une armoire de fibre optique a brûlé à Lleida, avec des conséquences plus réduites que celles d’avril.
Ces dernières années les médias ont passé sous silence quelques sabotages similaires en Catalogne, revendiqués sur des sites internet anarchistes : incendie d’antennes-relais, de câbles de chemin de fer, etc. Il n’est point surprenant que le pouvoir refuse d’admettre l’existence d’attaques contre la domination, d’autant plus si elles mettent en évidence la fragilité de certaines infrastructures. Le feu de Lleida a eu des effets très concrets et intéressants. Sans réseau, non seulement on ne peut plus payer par carte, mais les banques ne peuvent pas travailler, de sorte que de nombreuses agences ont dû fermer au moins un jour. Ni la DGT [ndt : Dirección General de Tráfico, institution chargée de gérer la circulation routière et les permis de conduire], ni le SEPE [ndt : Servicio Español de Empleo, l’équivalent de Pôle Emploi] n’ont pu travailler, pas plus que de nombreuses mairies.. À Mollerussa [ndt : une ville à 20km de Lleida], même le numéro de la police locale ne fonctionnait pas. L’expédition de papiers d’identité ne marchait pas non plus. Beaucoup d’entreprises ont dû fermer, qu’elles aient recours ou non à la télé-exploitation. En outre, le lieu de l’incendie, près des routes LL-11 et N-240, est proche de deux zones industrielles, qui ont également été affectées par la coupure. Le gouvernement catalan a activé un plan d’urgence, et même le secrétaire aux télécommunications s’est intéressé à la situation. Ainsi, la gravité que ces faits ont eu pour le pouvoir est évidente.
Une autre anecdote : il y a quelques mois, les tribunaux de Ripoll ont été contraints de fermer pendant un jour car il n’y avait pas de réseau internet. Des rats avaient rongé les câbles. Le commando ratatouille a fait en sorte que ce jour-là il n’y ait ni procès ni autres démarches judiciaires. Internet est essentiel pour le fonctionnement de cette société. Cela ne veut pas dire que sans réseau le pouvoir tombera, puisqu’il repose aussi sur d’autres infrastructures, personnes et rapports sociaux, mais si nous voulons frapper l’État, couper les (télé)communications devrait être une des priorités. Des faits divers comme ceux de Lleida ou de Ripoll montrent clairement la fragilité de certains points du réseau de fibre optique. Rongeons et cramons jusqu‘à ce que tombe le pouvoir !