
Alsace: 14 « gilets jaunes » jugés pour l’incendie de pylônes téléphoniques
AFP/France3, 25 septembre 2025
Le procès de quatorze « gilets jaunes » âgés de 22 à 63 ans pour l’incendie de neuf pylônes téléphoniques dans le Haut-Rhin, principalement en 2019, s’est ouvert jeudi à Mulhouse.
Jugés pour « destruction du bien d’autrui par moyen dangereux » et « participation à une association de malfaiteurs », ils encourent 10 ans de prison et 150.000 euros d’amende.
L’enquête avait débuté après l’incendie, le 5 janvier 2019, d’un premier pylône téléphonique sur la commune d’Altkirch, à proximité du rond-point de Carspach, important lieu de rassemblement des gilets jaunes dans le département.
Le mode opératoire était similaire à chaque nouvelle dégradation : « des pneus imbibés d’essence déposés au pied du coffret électrique qui se trouve à proximité du pylône puis enflammés« , avait précisé lors d’une conférence de presse en septembre 2020 Edwige Roux-Morizot, alors procureure de la République.
Les enquêteurs avaient rapidement fait des rapprochements avec le mouvement des Gilets jaunes, très actif à l’époque.
En juillet 2020, une première personne avait été mise en examen et en septembre 2020, une vaste opération menée par plus de 70 gendarmes issus des brigades territoriales du secteur, les brigades de recherches et les Psig (pelotons de surveillance et d’intervention), avait abouti à l’arrestation et à la mise en examen de 13 autres personnes.
Au total, neuf pylônes ont été détruits entre janvier 2019 et janvier 2020 sur les communes d’Altkirch, Roppentzwiller, Eteimbes, Seppois-le-Bas, Valdieu-Lutran, Traubach-le-Haut, Wittelsheim et Kingersheim. Outre les très grosses perturbations téléphoniques dans le secteur, ces incendies ont coûté très cher aux opérateurs, avec des dégâts estimés entre cinq et neuf millions d’euros. SFR, Bouygues Telecom et Orange se sont portés parties civiles.
Nées entre 1957 et 1998, les deux femmes et douze hommes mis en cause « ont des profils très différents, à l’image du brassage qu’on pouvait retrouver sur les ronds-points » avait décrit la procureure de la République. Alexandre Jeaunaux, commandant du groupement de gendarmerie départementale du Haut-Rhin, décrit une organisation très rigoureuse : « Les personnes se voyaient attribuer des rôles précis. Certains s’occupaient de la fourniture des moyens, notamment les pneus et les matières inflammables qui servaient à mettre le feu aux pylônes, d’autres organisaient la rencontre des personnes, d’autres encore repéraient les lieux et les antennes téléphoniques. On voit bien que c’est un vrai groupe qui a commis cette série d’infractions. »

Parmi les quatorze militants, certains auraient été particulièrement actifs au sein du mouvement des gilets jaunes, d’autres les auraient suivis par solidarité, selon la procureure. Ils n’ont pas exprimé de revendication politique claire. Le casier judiciaire de la plupart d’entre eux était vierge au moment des faits.
Jeudi, douze d’entre eux étaient présents au tribunal judiciaire de Mulhouse. Leur procès, reporté une première fois (le 30 janvier dernier) est prévu pour durer une journée.
Relais téléphoniques incendiés : quatorze ex-gilets jaunes jugés
L’Alsace/20Minutes, 26 septembre 2025 (extrait)
Les faits en cause remontent à 2019 et se sont déroulés dans différents endroits du Sundgau, dans le cadre du mouvement des gilets jaunes. Les prévenus ont pour la plupart fait partie du groupe qui se retrouvait au rond-point de Carspach. Puis, après une scission, ils ont pris pour QG une grange à Walheim.
Dans la nuit du 4 au 5 janvier 2019, cinq d’entre eux ont incendié deux antennes-relais de téléphonie mobile à Altkirch et Roppentzwiller, en mettant le feu aux coffrets électriques à la base de ces équipements avec un pneu imbibé d’essence. Dans la même nuit et selon le même mode opératoire, quatre autres prévenus s’en sont pris à une antenne à Eteimbes. Une troisième équipe est, quant à elle, partie du côté de Montreux-Vieux, mais elle n’aurait pas trouvé sa cible.
Une autre antenne-relais sera incendiée à Valdieu-Lutran dans la nuit du 31 août au 1er septembre et une dernière à Traubach-le-Bas le 21 septembre.
L’exemple australien
Les avocats de Bouygues Telecom, SFR et Orange, parties civiles, soulignent les répercussions de ces incendies : pour le premier, par exemple, 3 000 clients sundgauviens privés de liaison téléphonique, dont 931 pendant plus de quinze jours. « Il y aurait pu avoir des conséquences dramatiques », soulignent-ils surtout.
Le procureur, Jean-François Assal, abonde et rappelle qu’il y a quelques jours, en Australie, trois personnes sont décédées pendant une coupure téléphonique faute d’accès aux services d’urgence. « Il y a six ans, j’aurais requis des peines de 10 ans et demandé des mandats de dépôt. Mais six ans après, vous avez évolué, reconnu et avancé dans la vie. Les gilets jaunes sont derrière nous », a toutefois tempéré le magistrat qui a requis des amendes et des peines d’emprisonnement de 18 mois en sursis probatoires pour la plupart des prévenus, et des peines aménageables. Une peine de six ans de prison, dont un an ferme et mandat de dépôt différé, a néanmoins été requise contre le propriétaire de la grange où se retrouvait le groupe.
Les avocats de la défense estiment que l’association de malfaiteurs n’est pas constituée. Ils évoquent le contexte des faits et leur ancienneté. Six ans après, leurs clients, qui travaillent pour beaucoup, assurent avoir tourné la page.
Le tribunal rendra son jugement le 3 novembre.
