Royaume-Uni : recyclage de cadavres

Des policiers auraient pris l’identité d’enfants morts
Le Matin (Suisse), 7 décembre 2020

C’est un nouveau volet d’une vaste enquête sur les infiltrations sous couvertures pratiquées par des policiers britanniques durant des décennies: cette fois, quatre familles intentent une action en justice contre la Metropolitan Police (Met) de Londres pour avoir utilisé les identités de proches décédés. La plainte prétend que la Met «a abusé d’informations personnelles et s’est immiscée dans leur deuil, leur causant de la détresse et nuisant à leur santé mentale», explique le «Guardian».

Ces familles disent avoir été «dévastées» lorsqu’elles ont appris que des agents sous couverture avaient utilisé le nom d’un jeune proche décédé sans les consulter ni les informer. Concrètement, il s’agissait des identités d’un bébé mort à la naissance, d’un enfant de 5 ans tué dans un accident d’avion [identité utilisée pour infiltrer des groupes antispécistes], d’un autre lourdement handicapé décédé à 6 ans [identité utilisée pour infiltrer le Revolutionary Communist party et le groupe anarchiste Class War entre 1989 et 1993] et d’un adolescent qui s’était noyé. Ces quatre décès ont eu lieu entre 1968 et 2001.

La tactique de l’identité «usurpée» a régulièrement été utilisée durant plus de trois décennies, explique le quotidien britannique. Au moins 42 agents ont créé de faux personnages basés sur des enfants décédés. Ils passaient des heures à parcourir les certificats de décès pour dénicher les meilleurs «candidats» puis obtenaient de faux papiers comme des passeports ou permis de conduire.

Certains, pour rendre leur identité plus crédible, se rendaient dans le quartier où l’enfant avait vécu pour se familiariser avec l’environnement. Ou ils faisaient des recherches sur les proches du petit défunt pour améliorer leur couverture. Ces missions sous fausse identité duraient habituellement quatre ans. Au final, ces identités ont servi pour infiltrer des organisations d’extrême gauche, des associations de défense des animaux ou encore des groupes anarchistes ou anticapitalistes.

Contactée par le «Guardian», la Metropolitan police a dit «enquêter sur les allégations» et n’être «pas en mesure de commenter davantage pour le moment».

«Le Parisien» rappelle que cette plainte s’inscrit dans une vaste enquête sur les «flics espions», qui auraient infiltré plus de 1000 groupes politiques depuis 1968. Même si certains faits sont anciens, ces missions n’ont été révélées que récemment et l’enquête a officiellement commencé le mois dernier. Ses conclusions ne sont pas attendues avant 2023.

Dans un cas qui avait défrayé la chronique, un certain Bob Robinson avait infiltré un groupe écologique anarchiste [entre 2000 et 2003 à Londres et Nottingham, participant à des contre-sommets en Suède, France et Italie], s’était lié avec une militante, avait eu un enfant avec elle, puis s’était volatilisé. Il s’agissait d’un policier portant à nouveau l’identité d’un enfant décédé qui avait filé à la fin de sa mission…