En cette saison caniculaire de sécheresse, il n’est pas rare que des incendies se déclarent ici ou là dans des environnements dits naturels. C’est ainsi qu’aux environs de Jazeneuil (Vienne), deux petits champs de blé ont pris feu, donnant lieu à un entrefilet dans un torchon local. Bon, pour commencer, non seulement cela s’est produit en pleine nuit, celle de samedi au dimanche 3 juillet, mais aussi sur deux surfaces agricoles éloignées de plusieurs kilomètres, route de Sanxay et route de Rouillé. Ce qui n’a pas manqué d’éveiller notre curiosité. Peut-être quelqu’un.e de véner contre le proprio-paysan du coin, s’est-on alors dit, par exemple parce qu’il déverse des pesticides dans la rivière ou juste parce qu’il le vaut bien, allez savoir ?
Sauf que Jazeneuil n’est pas n’importe quel petit village, pour qui a un peu de mémoire, puisque c’est là qu’une chaleureuse contestation s’oppose depuis un an à un nouveau projet d’éoliennes industrielles mené par l’entreprise RES. En juin 2021, des pneus avaient ainsi été incendiés au pied d’un mat de mesure, puis en septembre ce sont des tags contre ce projet qui avaient fleuri sur la façade de la mairie et une dizaine de maisons, avant que parte en flammes un radar de mesure (Lidar) début décembre, en retardant le futur chantier éolien de plusieurs mois.
Là, on se dit alors que les petits champs de blé incendiés la nuit du 3 juillet étaient peut-être encore moins anodins que cela, abritant peut-être les intérêts de quelque agriculteur vendu à l’industrie éolienne, puisque même les flèches de la gendarmerie ont aussitôt qualifié ces deux incendies de « plutôt suspects ». Une intuition qui a finalement pris une dimension supplémentaire, lorsque les associations citoyennistes opposées à l’extension des aérogénérateurs dans la région, Vent de colère et la Fédération environnement durable, ont produit quelques jours plus tard leur petit communiqué de distanciation en bonne et due forme, permettant à la presse locale de titrer avec gourmandise : « Jazeneuil, deux associations dénoncent les dégradations incendiaires anti-éoliennes » (La Nouvelle République, 6 juillet).
Le diable se cachant parfois dans les détails (ou les épis de blé), c’est donc comme cela qu’on a incidemment appris que sur l’un des champs cramé se trouvait déjà une éolienne en fonction, tandis que le second abritait « depuis peu » un anémomètre (mât de mesure du vent), placé là en prévision de l’implantation de plusieurs autres. Que ce soient ces structures nuisibles qui aient en premier été visées avant que les flammes ne s’étendent à la manne de son hébergeur, ou que ce soient à l’inverse celles des champs qui aient fini par les endommager, on souhaite en tout cas bon vent aux inconnus qui continuent de se promener sous les étoiles estivales de Jazeneuil…
[Synthèse des entrefilets de la presse locale, 4 & 6 juillet 2022]