La Lime, 1er octobre 2020
Alors que le secteur culturel tente toujours de trouver un accord sur les mesures sanitaires à mettre en place avec un quelconque politicien en charge de la question, il y a bel et bien une salle de spectacle qui reste ouverte et tourne à plein régime.
Nous sommes donc au grand regret de vous annoncer la performance théâtrale qui aura lieu les 8 et 9 octobre 2020 au palais de justice de Bruxelles (ce mastodonte qui domine le quartier pauvre des Marolles et dont la grandiloquence a fait rêver plus d’un autoritaire).
Hélas, étant donné qu’il s’agit d’une procédure d’appel, le scénario ne brillera pas par son originalité. Mais soyez sûrs de ne pas être déçus par les incroyables tours de passe-passe de notre prestidigitateur, le procureur Malagnini.
Venez découvrir comment il lui suffit d’accoler une personne à une autre afin de créer l’illusion d’une organisation. Plus fort encore : en y ajoutant quelques chefs d’inculpation, il parvient même à invoquer une organisation criminelle (l’idée originelle de faire sortir de son chapeau une organisation terroriste ayant été recalée par son propre metteur en scène qui la trouvait trop farfelue).
Vous serez abasourdis en voyant comment il transforme un feu d’artifice de solidarité avec des migrants incarcérés en une incroyable tentative d’incendie à l’encontre de ces mêmes personnes.
Vous resterez bouche bée devant le fait que l’absence de preuves devient en fait… la preuve (tour uniquement possible grâce au fait que le dit « modus operandi » des accusés est de ne pas être identifiables… thèse d’ailleurs étayée par l’impossibilité de les identifier, haha, magie !).
Vous attendrez avec impatience la participation de son assistante, la juge d’instruction Panou. Sera-t-elle capable de nous expliquer comment une enquête qui part à la pêche aux accusations n’est pas du tout pro-active1, mais bien réactive2 ? (« Certes, votre honneur, une enquête proactive aurait été illégale dans ce contexte. Mais, des faits ont eu lieu à un moment donné. Donc, avec le recul, il s’agit bien une enquête réactive ! »)
Voici un avant-goût amer de ce spectacle qui est déjà en scène depuis 2009 sur les planches policières et depuis 2016 dans les couloirs de la justice. Une pièce basée sur des faits réels, mais qui dénature plusieurs années de lutte et de complicités combatives contre les expulsions, les prisons, les frontières et d’autres institutions de cette société oppressive. Nous savons parfaitement bien que nos vies et nos expériences collectives ne rentreront jamais dans leurs fables. Et pourtant, les scénaristes de cette piètre intrigue semblent déterminés à vouloir révéler de nouveaux talents de coupables à quelques figurants de mauvaise composition.
Faites donc ce que bon vous semble en ces jours de représentation.
Les accusés en feront de même.
On vous tiendra au courant de la suite du programme.
Des anarchistes (plus ou moins) concernés par ce qu’il se passe à Bruxelles et ailleurs.
PS : le seul PS qui vaille est le post-scriptum
Post-scriptum 1 : le rendu de jugement devrait arriver endéans le mois qui suit le procès.
Post-scriptum 2 : pour plus d’infos sur cette affaire
1. Récolter des informations en vue de faits qui ne sont pas encore survenus ou sont encore inconnus.
2. Se baser sur des faits spécifiques afin d’en identifier les auteurs.