Lille : le business de la construction des nouveaux centres de rétention

[Appel reproduit ici pour infos sur les collabos actuels de la machine à expulser… Une liste concernant le nouveau CRA de Lyon-Saint-Exupéry était déjà parue ici]

L’État agrandit le C.R.A (Centre de rétention) de Lesquin pour toujours plus d’enfermé.es !

Indymedia Lille, 29 novembre 2020

Macron et son gouvernement, depuis leur accession au pouvoir, se placent dans la continuité de leur prédécesseurs, à savoir s’inscrire dans une vision répressive de l’immigration. Depuis trois ans, la politique du ministère de l’intérieur est de renforcer le contrôle et l’enfermement des personnes étrangères avec, notamment, la loi asile et immigration de 2019. Cette loi, rappelons-le, permet notamment d’enfermer une personne pour une durée maximale de 90 jours contre 45 auparavant. Dans le même temps, l’État entreprend des travaux afin d’augmenter sa capacité à mettre des personnes derrière les barreaux. Rien que pour l’année 2020, 481 nouvelles places seront disponibles. Selon les endroits il peut s’agir de ré-ouvertures de centre (Hendaye, Geispolsheim), de travaux d’extension ou de construction de nouveaux centres comme à Lyon, Olivet et Bordeaux, dont les ouvertures sont prévues pour fin 2023. Les deux centres de la région (Coquelles et Lesquin) sont également concernés.

Au centre de Lesquin, créé en 2006, les travaux portent sur la création de 30 nouvelles places d’enfermement pour porter la capacité totale du site à 116 places (contre 86 actuellement) en 2021. La rénovation comporte également la réfection des parties réservées à la police aux frontières. Pour faire simple, le projet de l’État c’est plus de places pour enfermer les personnes étrangères dans des cellules plus petites qu’actuellement (16,2 à 12,7 m2) avec plus de confort pour les matons !

Quand l’État opte pour un contrôle, une mise à l’écart et l’expulsion des personnes, des entreprises vivent et s’enrichissent de cette machine à expulser. Pour l’extension du centre de Lesquin, le magot s’élève à 1 900 000 €.

L’architecte est le même que celui à l’origine des plans lors de la création du centre. Il s’agit de Anaa Architectures situé au 14 rue du quai à Lille. Le gros œuvre ainsi que les travaux de plomberie sont réalisés par la grande entreprise du BTP de la région, Ramery Bâtiment (740 Rue du Bac, 59193 Erquinghem-Lys).

La coordination en matière de normes de sécurité et d’hygiène est assurée par DEKRA, 78 rue Gustave Delory à Lesquin. Le contrôle technique se fait par le groupe Qualiconsult, 13 rue Pierre et Marie Curie à Lezennes.

Pour l’électricité, c’est Ramery Energie (rue Jacques Messager, 59175 Templemars) qui s’en charge, et enfin Consult Energie Bat (1 Rue Jean Wiener, 62210 Avion) joue un rôle d’expert et de consulting.

L’agrandissement du C.R.A met sur le devant de la scène des entreprises insensibles à l’enfermement et à l’expulsion des personnes quand il est question de profit. Elles ne sont pas les seules. D’autres acteurs, quotidiennement au service du CRA de Lesquin, participent activement à la machine à enfermer, à expulser :
- La Police aux Frontières (PAF) gère le centre. Elle s’occupe des fouilles, des déportations, des transferts vers les tribunaux ou autres CRA, de l’accueil des visiteur.euses, de réprimer les révoltes… Leur commandant est Denis Philippe.
- Le nettoyage des bâtiments et la blanchisserie sont réalisés par ONET, leader français dans le domaine de la propreté, également connu pour exploiter des sans papiers. La nourriture infâme est préparée par Compass (92 rue royale, Lille), spécialiste de la restauration collective. La maintenance des bâtiments (plomberie, électricité, chauffage …) est effectuée par le groupe Engie Axima.
- Dans chaque centre de rétention, une association est censée réaliser des « prestations d’aides juridiques et sociales ». À Lesquin, c’est l’Ordre de Malte (57 rue Pascal, Lille) qui a remporté l’appel d’offre. Dans l’ensemble, elles ont pour rôle principal de pacifier les relations à l’intérieur du centre. L’accompagnement se réalise uniquement individuellement, par des biais juridiques. Les travailleur.euses maintiennent une ambiguïté quant à leur capacité à faire sortir les personnes enfermées par le biais de recours juridiques. Il est difficile de placer ses espoirs dans le droit quand, depuis des années, ce dernier est uniquement répressif. À cela s’ajoute, dans la pratique, le tri des dossiers selon les chances de voir le recours aboutir.

La logique de ces associations n’est pas censée être répressive. Cependant, même lorsqu’elles font une critique des CRA, cette dernière porte davantage sur les conditions d’incarcération plutôt que sur la question de la privation de liberté. Leurs discours revendicatifs ou de soutien aux détenu.es brillent par leur absence. Ainsi, dans les cas de violences policières, de révoltes et de grèves de la faim, elles refusent de se positionner. Ce fût, par exemple, le cas cette année avec la gestion catastrophique de l’épidémie au sein des centres et des grèves de la faim et mutineries qui s’en sont suivies.

Dans la même logique humanitaire, l’accès aux soins est réalisé par des médecins et infirmier.ères du C.H.U de Seclin. Dans la réalité, de nombreuses personnes nous témoignent de la difficulté à se faire ausculter mais aussi de la distribution massive et facile de calmants, d’anxiolytiques.

Ces entreprises complices ont bien souvent pignon sur rue.
Soyons imaginatif.ves pour rendre visible leur collaboration à l’enfermement et aux expulsions.
Solidarité avec les enfermé.es !