Île-de-France : piller les DAB « à la fourchette »

Île-de-France : les voleurs « à la fourchette » se servaient
dans les distributeurs de billets

Le Parisien, 24 novembre 2021


Soupçonnés d’avoir commis au moins 25 vols « à la fourchette » dans toute l’Île-de-France, deux hommes, âgés de 31 et 33 ans, ont été interpellés en flagrant délit, lundi soir à Paris (XIIIe). Ils ont été surpris par les enquêteurs de la sûreté départementale de l’Essonne alors qu’ils étaient en train de s’affairer sur un distributeur de billets d’une Caisse d’Épargne.

Cette méthode est apparue en France en 2012. Elle a été importée par une équipe de malfaiteurs roumains qui avaient écumé les banques de l’Hexagone pour un préjudice de plus d’un million d’euros.

L’enquête commence au mois d’août lorsque les forces de l’ordre relèvent une série de huit vols identiques dans les agences bancaires du Crédit lyonnais (LCL) dans l’Essonne : à Draveil, Montgeron, Savigny-sur-Orge, Longjumeau… Deux suspects sont immortalisés par les caméras de surveillance des banques. Leur méthode dite « à la fourchette » consiste à introduire une carte bancaire dans l’appareil et à retirer une modique somme. Puis, les malfaiteurs recommencent et demandent le montant maximum, entre 300 et 500 euros. L’un des voleurs bloque la trappe avec un pied-de-biche. Son complice annule la transaction et ils s’emparent de l’argent avec une petite fourchette, très fine, comportant deux dents repliées, qu’ils introduisent dans la paupière de distribution de l’automate.


[Autre explication d’un site policier, 27/11 : Le mode opératoire est bien rodé. Les malfrats insèrent au préalable une carte prépayée pour retirer une petite somme. Ils mettent la fourchette dans la trappe dès que l’argent sort. Puis ils renouvellent l’opération en demandant cette fois une forte somme, afin de la prélever alors que les billets ne sont qu’en préparation à travers la trappe restée ouverte. Il ne leur reste plus qu’à annuler l’opération pour que leur carte prépayée, peu approvisionnée, ne soit pas débitée. Et peuvent reproduire cette technique à l’infini.]

« Les images de surveillance ont révélé que celui qui intervenait sur l’appareil ne portait pas de gants, précise une source proche de l’affaire. Les fonctionnaires ont isolé sur une machine l’empreinte génétique de Mathieu B. » Cet habitant de Bagneux (Hauts-de-Seine) est connu des archives de la police pour différentes malversations bancaires. Les enquêteurs identifient son complice grâce à l’immatriculation de sa voiture. Mehdi est logé dans un appartement de La Celle-Saint-Cloud (Yvelines).

Entre les mois d’août et octobre, les vols continuent dans les Hauts-de-Seine, à Rueil-Malmaison, Vanves, Montrouge, Clamart, Issy-les-Moulineaux. Mais aussi à Romainville (Seine-Saint-Denis) et dans les XIIIe, XVIIIe, XVe et XIXe arrondissements de Paris. Le préjudice s’élèverait d’ores et déjà à plusieurs dizaines de milliers d’euros mais le nombre de vols n’a pas encore été listé avec certitude.

Les opérations des voleurs s’interrompent fin octobre car Mehdi part trois semaines en vacances. Le 22 novembre, le duo repasse à l’action. Mehdi passe chercher Mathieu et ils se rendent à Paris dans le XIIIe arrondissement pour commettre un nouveau méfait. Ils sont interpellés en flagrant délit alors qu’ils viennent de bloquer la trappe d’une machine de l’avenue d’Italie. Les deux suspects sont placés en garde à vue dans les locaux de la sûreté. Lors de la perquisition menée à La Celle-Saint-Cloud, les policiers mettent la main sur 5 000 euros et Mehdi confirme qu’il s’agit d’une partie du butin.

À Bagneux, chez le second suspect, les fonctionnaires découvrent encore 5 000 euros et de nombreuses « fourchettes », fabriquées avec des morceaux de métal. Les enquêteurs ont également trouvé plusieurs centaines de cartes bancaires vierges, des encodeurs, des éléments de distributeurs automatiques de billets et des moulages de pièces de ces appareils qui lui servaient à s’entraîner.

Visiblement fier de ses performances, les policiers ont trouvé dans la mémoire de son téléphone portable une vidéo le mettant en scène en pleine action. Durant leurs auditions, les deux hommes ont gardé le silence. Ils devaient être déférés ce mercredi au parquet d’Évry (Essonne).