Indymedia Lille, 28 juin 2022
Alfredo M. Bonanno, Sous les verrous. Une réflexion sur la prison, ed. L’impatience (Marseille), juin 2022
format a6 / 130 pages / 4 euro
(3 pour les distros)
pour commander :
impatience (at) riseup (dot) net
Extrait de la préface de 1997 :
Le texte que nous publions ici est la transcription d’un enregistrement d’une conférence sur la prison, donnée en mars 1993 au Laboratorio anarchico de la via Paglietta à Bologne et précédemment publiée dans le livre Affinités et organisation informelle par les éditions Anarchismo. Cette conférence est reproduite ici avec quelques corrections mineures de son auteur, et une introduction écrite de sa main dans la prison de Rebibbia.
Plusieurs raisons nous ont poussés à publier cette brochure.
Tout d’abord l’intérêt des arguments exposés, que nous partageons, et en particulier l’idée principale de la nécessaire destruction de la prison. C’est, de fait, une des prérogatives du mouvement anarchiste de revendiquer un monde sans aucune espèce de prison, et d’interpréter ce désir dans le sens offensif, de la destruction de la prison dans une optique révolutionnaire. Pour que nous puissions tous être libres, nul ne doit en être exclu.
Par ailleurs, la prison est une réalité qui nous touche de près tout particulièrement aujourd’hui, étant donné la répression qui s’abat sur de nombreux anarchistes à travers toute l’Italie.
Mais, au-delà de cette grave circonstance, cette publication voudrait inciter les anarchistes plus particulièrement à rouvrir un débat sur la question de la prison, débat qui s’est atténué ces derniers temps, et qu’il serait bon, selon nous, de reprendre pour se doter de nouveaux instruments théorico-pratiques sans préjugés, pour actualiser un projet offensif à propos de l’enfermement.
En apparence, la prison est le lieu physique où est enfermée la vie de milliers d’individus, où sont limités derrière d’épaisses murailles hautement surveillées les possibilités et les moyens de se déplacer pendant un certain laps de temps. Mais la prison, ce n’est pas que cela, ce n’est pas seulement la dernière barrière de la société où on ne peut entrer que comme prisonnier ou comme geôlier. Ce n’est pas que le côté obscur de notre façon de vivre, ce placard inaccessible à nos regards de bons citoyens, où sont rangés les rebuts ou les ennemis de notre bien-être avec ces antipathiques mais nécessaires instruments de nettoyage.
La prison est le lieu où prend corps le concept de peine, c’est l’architecte qui le projette, c’est l’entreprise qui le construit, c’est la loi qui le ratifie, c’est le tribunal qui l’ouvre, et le flic qui t’y conduit, c’est l’agent qui te surveille, c’est le prêtre qui vient y dire sa messe, c’est le psychologue qui vient y délivrer son savoir. C’est cela, et encore bien autre chose. C’est l’entreprise qui exploite le travail des détenus. C’est celle qui s’enrichit en y fournissant les repas, les divers services, les systèmes de contrôle, les « cantines » que les détenus peuvent acquérir à des prix exorbitants, parfois en faisant des travaux destinés à les réinsérer dans la société des serfs et des patrons. La prison, c’est encore le professeur qui la justifie, le réformateur qui la veut plus humaine, c’est le journaliste qui fait le silence sur ses conditions, c’est le citoyen qui l’ignore ou la craint.