Avis de tempêtes – bulletin anarchiste pour la guerre sociale n°53 (mai 2022) vient de sortir.
« Face aux rouleaux compresseurs de la civilisation industrielle et du progrès, un des derniers mondes sensibles peuplé d’imaginaires terrifiants et de fantaisies enchantées est en train de disparaître sous nos yeux : celui des forêts. Celles qui ont pu être le domaine des seigneurs où s’alignaient les pendus, et le refuge où fuir les persécutions. Celles qui ont pu être l’obscurité où abandonner sa progéniture affamée, et le havre touffu d’où partir à l’assaut de l’existant. Celles qui ont pu abriter les mystères peuplés de dryades et de lycanthropes, et voir passer les bâtisseurs de navires de guerre et autres maîtres des forges venus les dépouiller en masse. Celles qui ont vu à Sherwood des bandits audacieux détrousser les riches, en Ariège des Demoiselles au visage de suie incendier et piller des châteaux, en Courlande des révolutionnaires continuer de porter leurs coups féroces contre la tyrannie tsariste, mais aussi assister dans les Alpes ou en Pologne à la mort de froid de migrants traqués par les garde-frontières européens.
Au fond, les forêts sont ambiguës jusque dans leur étymologie même, puisque la foresta a d’abord signifié les espaces extérieurs non utilisés par les villageois –à tel point que le mot sauvage vient lui-même de silvaticus, c’est-à-dire sylvestre–, avant de désigner les vastes zones boisées réservées à la noblesse et aux monastères en étant protégées des usages paysans. Par un étrange renversement de sens du mot foresta, l’inconnu dangereux que la civilisation romaine ne parvenait pas à asservir, en est venu à qualifier au bout de quelques siècles le territoire par excellence de la domination religieuse et féodale, avant de devenir finalement un nom générique et plutôt flou. »
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