Sainte-Baume (Var) : le laboratoire judiciaire part en fumée

Mystérieux incendie criminel dans un laboratoire d’expertise de scellés judiciaires sensibles dans le Var
Le Parisien, 15 février 2023

Cherchaient-ils à effacer des éléments compromettants issus d’enquêtes judiciaires sensibles ? Un laboratoire spécialisé dans l’analyse des supports numériques situé à environ 45 km au nord de Marseille a été la cible d’un incendie criminel, dans la nuit de mardi 13 à mercredi 14 février. Peu après minuit, selon des images captées par des caméras de vidéosurveillance, trois hommes encagoulés ont ainsi pénétré par effraction au sein de ce laboratoire avant d’asperger les lieux d’un produit inflammable et de projeter des engins incendiaires.

Selon nos informations, les trois suspects ont ensuite pris la fuite à bord d’un véhicule équipé d’une fausse plaque d’immatriculation. La voiture des malfaiteurs a finalement été retrouvée incendiée à 600 m du lieu des faits. Les trois hommes sont actuellement en fuite. La police judiciaire de Marseille est chargée de l’enquête. Initialement confiées au parquet de Draguignan, les investigations ont été transférées à Marseille en raison de la sensibilité du dossier. Car le laboratoire visé ne l’a sans doute pas été par hasard.

Le site, blotti au pied du massif de la Sainte-Baume dans le Var, appartient en effet à un expert auprès de la cour d’appel d’Aix-en-Provence et travaille en lien direct avec la justice. Spécialisé dans le traitement des supports numériques, le laboratoire dispose d’une expertise reconnue pour retrouver des données supprimées et effacées de téléphones portables, d’ordinateurs, de clés USB et appareils photos… Une spécialité et une capacité à travailler parfois plus rapidement que les laboratoires de la police et de la gendarmerie qui lui permet de se voir ainsi confier de nombreuses missions d’expertises dans le cadre d’enquêtes judiciaires menées sur la Côte d’Azur.

Ces dernières années, nombre de téléphones ou d’ordinateurs saisis dans des dossiers sensibles ayant trait au narco-banditisme marseillais ont ainsi été envoyés au sein de ce laboratoire privé afin d’être analysés. « On a effectivement un partenariat avec ce laboratoire, confie un enquêteur en poste dans le sud de la France. Les juges d’instruction y envoient beaucoup de téléphones ou d’ordinateurs, notamment dans les dossiers de trafics de stupéfiants où les expertises sur le volet numérique sont très importantes et complexe, car les voyous utilisent des messageries cryptées ou des messages éphémères… »

Reste désormais à connaître l’ampleur des dégâts. Avec une question cruciale : des scellés restant à analyser ou des résultats n’ayant pas encore été transmis à la police ou aux services de justice ont-ils été détruits lors du sinistre ? Selon les premières constatations des gendarmes sur place dans la nuit de mardi à mercredi, le local des scellés n’aurait pas été directement impacté par l’incendie. « La certitude, c’est que cela ressemble bien à une attaque ciblée », confie une source proche de l’enquête.

À ce stade, le mobile de l’incendie reste toutefois indéterminé. Si le mode opératoire – hommes cagoulés, voiture incendiée… – laisse forcément penser à une action menée par le grand banditisme en vue de détruire des preuves, l’hypothèse d’une concurrence commerciale ou d’un différent d’ordre privé doivent aussi être étudiées par les enquêteurs de la PJ.


Incendie du laboratoire d’expertise au pied dans le Var: des pertes de données « minimes »
Var matin, 26 février 2024

Un laboratoire varois, spécialisé dans le traitement judiciaire de données numériques, a été visé par un incendie criminel le 14 février. L’enquête est entre les mains du parquet de Marseille.

La crainte était grande de voir des scellés judiciaires être détruits en même temps que les locaux du laboratoire d’expertise numérique incendié dans la nuit du 13 au 14 février au pied de la Sainte-Baume . C’était sans doute là, d’ailleurs, le but des trois criminels qui ont pénétré par effraction dans le bâtiment avant d’asperger les lieux d’un produit inflammable et d’y mettre le feu.

Mais l’expert judiciaire près la cour d’appel d’Aix-en-Provence auquel appartient le laboratoire a précisé à Var Matin qu’il ne conserve jamais sur ses serveurs les données étudiées. « Une fois récupérées, les données à exploiter sont externalisées sur des serveurs dématérialisés sécurisés, ce que tout le monde appelle le cloud. Le scellé physique, lui, reste entre les mains de la justice. Nous agissons ainsi par sécurité mais aussi par ce que nous travaillons de concert avec des équipes externes et des services étatiques qui ne se trouvent pas dans le Var. »

De ce fait, si les dégâts matériels dus à l’incendie sont assez importants, ceux sur les données sensibles sont « minimes ». Ce qui n’enlève en rien le choc vécu par l’équipe du laboratoire, toujours vivace trois jours après les faits. Les répercussions se font ressentir dans toute la profession, inquiète d’être prise pour cible en raison de la sensibilité des dossiers criminels dont elle a à connaître.

À l’heure actuelle, les trois individus ayant incendié le laboratoire sont toujours recherchés. Les investigations ont été confiées au parquet de Marseille.