A force de voir tant d’hommes et de femmes menottés être trimballés sans ménagement à travers d’interminables couloirs, puis partir en taule à la nuit tombée… A force d’assister à tant d’audiences en visioconférence où câbles et écrans empêchent désormais de cracher physiquement à la gueule des juges, ou de réfléchir plein de rage au bon moment pour sauter du box et tenter de prendre la poudre d’escampette… A force de contempler un bel échantillon de ce que le genre humain peut offrir de plus vil – bourreaux en uniforme, crapules en toges, journalistes consciencieux, experts de la raison du plus fort, greffiers je-ne-fais-que-mon-travail, balances repentantes… A force d’entendre les plaintes de beaux parleurs réclamer ce qu’un outil de la domination ne peut structurellement pas leur donner, à savoir la justice ou la vérité, qui plus est inexistantes au ciel comme sur terre… A force même, qui sait ?, de réflexions sur l’incompatibilité absolue entre autorité –celle qu’il incarnait si bien– et liberté… le tribunal de Roberval est parti en fumée dans la soirée du 8 mai 2021. Mais après tout, la célèbre devise du blason de cette petite bourgade québecoise située au bord du lac Saint-Jean ne professe-t-elle pas fièrement « À cœur vaillant, rien d’impossible » ?
Lire la suite