Limoges : trois ans de prison ferme requis pour l’incendie de véhicules de gendarmerie à la caserne Jourdan
France Bleu, 28 février 2023 (extraits)
Plus de cinq ans après l’incendie volontaire dans la caserne de la gendarmerie Jourdan, en 2017 à Limoges, un homme de 37 ans comparaissait ce mardi devant le tribunal correctionnel de Limoges. S’appuyant notamment sur son ADN, retrouvé sur le portail de la caserne, le parquet a requis quatre ans de prison à son encontre, dont trois ans ferme pour l’incendie, ainsi que l’interdiction de paraître en Haute-Vienne. Le Procureur de la République de Limoges demande également l’indemnisation de l’Etat pour les dégâts au sein de la gendarmerie, estimés à 243.545 €.
De son côté, le prévenu assure toujours qu’il n’est pas responsable de ce feu dans lequel cinq véhicules de gendarmerie [trois fourgons et deux bus de transport de troupes] ont brûlé. Ses avocats ont donc plaidé la relaxe. Une vingtaine de personnes sont également venues le soutenir, en se réunissant devant la cité judiciaire avant l’ouverture de ce procès, puis en assistant à l’audience. Le jugement sera rendu le 17 mars par le tribunal correctionnel de Limoges.
La question centrale de l’ADN
L’audience aura duré tout juste 3h, sous protection policière renforcée. Le trentenaire (…) a tenté d’expliquer comment son ADN avait été retrouvé sur le haut d’un portail de la caserne. Des traces à l’extérieur et à l’intérieur. A la présidente du tribunal, le prévenu, qui habitait dans le quartier à l’époque des faits, répond : « Je ne suis pas responsable du devenir de mon ADN. J’ai pu m’appuyer sur le portail lors d’un footing, quelqu’un a pu prendre mes gants. »
C’est la seule preuve sur laquelle s’appuie le parquet pour requérir trois ans de prison ferme, mais ça ne suffit pas répond Me Raphaël Kempf (barreau de Paris) l’un des deux avocats de la défense : « L’ADN est migrateur, donc c’est souvent très difficile d’expliquer la raison pour ADN se retrouve à tel ou tel endroit. Et de toute façon, c’est le rôle de l’accusation de démontrer que le prévenu a incendié ces véhicules de gendarmerie et nous pensons que le parquet n’a pas apporté cette preuve. » Pour lui, le doute doit donc bénéficier à son client.
Après 6 mois d’enquête, 4 ans d’instruction, 2 ans de privation de liberté, 4 juges d’instruction et 6.500 pages de dossiers… les avocats de la défense mettent en avant les soupçons qui ont conduit les enquêteurs à s’intéresser au prévenu dès le début, « les gendarmes eux-mêmes ont pris pour acquis que c’était ce qu’ils appellent l’ultra-gauche anarchiste avec une confusion totale sur les termes employés », rajoute Me Kempf.
Aujourd’hui installé dans la Somme, plombier à son compte, le trentenaire ne s’en cache pas : il est anarchiste, mais nie toute implication avec le groupe qui a revendiqué l’incendie le lendemain des faits. Il reconnaît en revanche avoir participé à une action anti-pub, avoir écrit un commentaire pour défendre des migrants, avoir été à Milan pour tenter de manifester contre l’exposition universelle.
« Nous ne sommes pas là pour juger les idées politiques », rappelle le procureur de la République de Limoges lors de ses réquisitions. « Il y a eu un incendie volontaire et un refus de prélèvements. Si les faits ont été requalifiés ça n’enlève rien à leur gravité » insiste le parquet, pour qui l’implication du prévenu ne fait aucun doute.
L’audience a également été consacrée à un autre volet de cette affaire : lors de l’instruction, le prévenu avait refusé de se soumettre au prélèvement de ses empreintes génétiques. Pour ces faits, le parquet a requis deux mois d’emprisonnement et la révocation des sursis, pour des faits similaires, soit 3 mois supplémentaires. Cet homme, qui vit désormais dans la Somme, plombier à son compte, a en effet déjà été condamné pour refus de ce type de prélèvements, suite à des manifestations ou des actions militantes.