Berlin (Allemagne) : attaque solidaire contre la Deutsche Bahn

[La nuit de mercredi à jeudi 27 juillet vers 2h du matin, des inconnus ont brisé plusieurs vitres des bureaux de la Deutsche Bahn [DB, SNCF allemande]  et incendié deux véhicules de l’entreprise dans la rue Caroline-Michaels-Straße du quartier de Mitte, à Berlin. Des crève-pneus ont aussi été laissés sur place pour retarder l’intervention des flics, ainsi qu’un grand tag « Stop Tren Maya » sur les vitres défoncées, du nom de ce projet dévastateur de réseau de chemin de fer touristique lancé en 2018 au Mexique, auquel participe notamment la Deutsche Bahn. Plusieurs sabotages contre cette compagnie se sont déjà produits dans ce sens, notamment à Düsseldorf en mai avec 5 attaques incendiaires contre les câbles de signalisation du chemin de fer, à Hambourg en mars avec les vitres brisées de l’entrée de son siège, ou en mars de l’année dernière à Berlin avec le sabotage incendiaire de câbles ferroviaires aux abords de la gare de Berlin-Wuhlheide.
On trouvera ci-dessous un large extrait du communiqué de revendication, traduit de l’allemand et sorti le jour-même.]


Attaque contre la Deutsche Bahn – Stop Tren Maya – Switch Off !

La nuit du 27 juillet, nous avons attaqué le complexe de bureaux de la Deutsche Bahn sur la Caroline-Michaelis-Strasse à Berlin-Mitte avec des marteaux et des engins incendiaires. Nous avons détruit les fenêtres de l’entrée de deux immeubles de bureaux et tagué les mots « Stop Tren Maya ». Une voiture électrique DB Flinkster [service d’autopartage en gare de la Deutsche Bahn] et un véhicule de service de la DB ont été incendiés sur leur parking. Nous avons lancé des crève-pneus dans la rue pour ralentir les flics qui s’approchaient.

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles la Deutsche Bahn a été prise pour cible. Très concrètement, nous voulons, avec cette attaque, relayer les protestations persistantes qui se déroulent dans le sud du Mexique contre le « Tren Maya » et les porter là où se trouvent les responsables : ici. La Deutsche Bahn, qui appartient à l’État allemand, fait office d’opérateur fantôme de ce projet d’infrastructure à travers sa filiale DB Engineering and Consulting, et en tire des millions sanglants.

Le nom cynique de « Tren Maya » cache à lui seul ce qu’il y a vraiment derrière. Car ce mégaprojet n’est pas « juste » un train. C’est un projet d’infrastructure néocolonial. Une entreprise écocidaire qui signifie la destruction des dernières forêts tropicales d’Amérique du Sud. Un projet de contre-insurrection contre les communautés indigènes et les zapatistes du sud du Mexique, leur expulsion et l’accaparement colonial des terres. Un mur de béton et de rails pour isoler le riche nord de la migration du sud, géré par l’armée mexicaine et avec pour co-responsable l’Etat allemand à travers la DB.

(…) Le mensonge du bon rail

Par les airs, par les fleuves, par les routes et par les rails : les voies de transport sont comme des veines qui s’étendent sur la terre. Nous les utilisons peut-être pour rendre visite à nos parents ou à nos amis, ou pour partir en vacances. Mais elles servent avant tout à la circulation des marchandises et de la main-d’œuvre. Plus elles sont consolidées ou aménagées, plus les personnes et les marchandises peuvent s’y déplacer rapidement. Depuis toujours, les routes et les voies ferrées sont également les signes avant-coureurs de l’avancée des armées, de la colonisation et de la destruction de la terre ou de la transformation des êtres humains et de la nature en main-d’œuvre et en marchandises. Les projets d’infrastructure servent aux autorités à désenclaver les régions non dominées par l’Etat ou encore non-soumises à la logique capitaliste et constituent un vecteur de contre-insurrection. Le contrôle de la mobilité constitue donc l’un des piliers les plus élémentaires de la domination. Ce que l’on appelle le « Tren Maya » est un projet de réorganisation territoriale à l’endroit même où se trouve un des plus grands couloirs migratoires du monde vers les États-Unis. Le fait que l’armée mexicaine soit chargée de sa gestion et qu’elle en perçoive les bénéfices en donne une image claire : ce chemin de fer est un projet militariste qui va à l’encontre de la liberté de mouvement des individus. Mobilité pour ceux qui peuvent se payer les billets de train, en voyageant du nord vers le sud.Mais pas pour ceux qui essaient de se rendre du sud au nord pour survivre, car leurs bases de vie ont été détruites.

La crise climatique est une question économique et sociale

Depuis des siècles, les luttes anticoloniales attirent l’attention sur les conséquences de la destruction de la Terre et des bases de toute vie. Leurs voix ont été reprises de temps à autre dans les centres de pouvoir impériaux, mais pas de manière conséquente. Oui, nous sommes ici dans la salle des machines, nous sommes des rouages dans leurs rouages. Chaque personne profite différemment du système dominant ou est opprimée de différentes manières. La prospérité du Nord mondial dont nous parlons est une prospérité qui se répartit selon des questions de classe.

Il est indispensable de prendre en compte les luttes qui ont lieu dans d’autres régions du monde et de leur offrir un écho. Cela signifie cibler les responsables qui siègent dans les métropoles du Nord mondial et qui profitent de l’oppression coloniale et patriarcale induite par le système capitaliste. Cela signifie également rendre les luttes visibles et reprendre, discuter et multiplier leurs critiques, idées et propositions. En même temps, nous devons construire une perspective qui nous permette ici, collectivement, de renverser l’existant. Nous voulons nous joindre aux paroles de l’appel « Switch-Off – the system of destruction » pour continuer à passer à l’offensive :
« Ce dont nous avons besoin dans la lutte contre la destruction de la nature et la misère sociale qui en résulte, c’est l’effort commun pour la véritable rupture révolutionnaire et la liberté pour tous. D’une initiative qui rejette tous les compromis et les corrections cosmétiques de l’Etat, et qui provoque une transformation de nos relations sociales. Car la destruction de la planète par le système économique néolibéral est indissociable des schémas de pensée patriarcaux, du racisme et du colonialisme. L’initiative doit nécessairement venir d’en bas. Des luttes des exclus. Des luttes de ceux qui opposent une coexistence auto-organisée et solidaire à la promesse de sauvetage de l’État. Des luttes de ceux qui voient qu’il ne peut y avoir de compromis dans la lutte contre la destruction systémique de la biosphère ». (switchoff.noblogs.org)

Avec cette attaque contre la Deutsche Bahn, nous voulons poursuivre la série d’actions qui se sont déjà produites ces derniers mois contre le « Tren Maya » et inviter tous les alliés à une nouvelle participation radicale aux luttes contre la destruction de la planète.

Switch Off – attaquer durablement le système de destruction.
Stop Tren Maya !

[Traduit de l’allemand de de.indymedia, 27 juillet 2023]